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mercredi 9 août 2023

9. 24. Escoles de France, Picardie, Normandie, d' Angleterre: cette cy aujourd' huy nommée d' Allemagne,

Escoles de France, Picardie, Normandie, d' Angleterre: cette cy aujourd' huy nommée d' Allemagne, & depuis quel temps, & pourquoy.

CHAPITRE XXIV.

Il ne faut faire aucune doubte qu' entre les quatre nations de l' Université de Paris, à chacune desquelles fut du commencement voüée une grande Escole pour y entendre les leçons des Arts, il y en avoit une qui portoit particulierement le nom d' Angleterre. Ainsi le voy-je par expres, en l' accord que Simon Cardinal de saincte Croix legat en France fit en l' an 1275. entre la nation de France d' une part, & celles de Picardie, Normandie, & Anglesche d' autre part. Distinction qui estoit encores en essence sous le regne de Charles VI. comme je recueille d' une cause qui fut traitée de son temps au Parlement de Paris dont le fait estoit tel. Un Jourdain de Olivis Anglois, Maistre és Arts, & Bachelier en Theologie, se donnant qualité de Vichancelier de saincte Geneviefve, & ayant sous soy creé trois examinateurs, Maistre Jean Troüillet Picard, Jean de Vaux Normand, Guison Anglois, pour proceder à l' examen des Maistres és Arts, qui vouloient passer Maistres és Arts en l' Eglise saincte Geneviefve, il fut empesché de ce faire par l' Abbé & le Chancelier, qui formerent contr'eux complainte en cas de saisine & nouvelleté: avec lesquels demandeurs se joignit le Procureur de la nation de France, pour l' interest qu' il y pouvoit avoir. La cause du commencement introduite pardevant le Prevost de Paris, ou son Lieutenant conservateur, depuis devoluë par appel au Parlement. Soustenoient l' Abbé, & le Chancelier, que combien qu' à eux seuls appartint privativement de tous autres  de commettre un Vichancellier & quatre examinateurs de telle nation qu' il leur plaisoit, fors toutesfois & excepté qu' ils estoient tenus d' en prendre un de la nation Françoise: toutesfois les defendeurs de leur authorité privée s' estoient dispensez de cette regle concluans pour cette cause aux fins &c. A quoy les deffendeurs venans à respondre, le narré de l' Arrest estoit tel Dictis ex adverso proponentibus & dicentibus, quod in Universitate Parisiensi sunt quatuor nationes, videlicet Gallicana, nec non Picardiae, Normaniae, & Angliae. Je vous laisse leurs moyens qui ne furent trouvez bons, & les demandeurs maintenus & gardez en leurs possessions & saisines, me contentant de vous dire que par l' Arrest qui est du douziesme Juillet mil trois cens octante deux, deuxiesme du regne de Charles sixiesme, il est fait mention de la nation d' Angleterre tout ainsi que des trois autres, & tant & si longuement que ce Roy regna, l' Escole Anglesche fit part & portion de l' Université. Car mesme Henry cinquiesme Roy d' Angleterre de ce nom espousa Catherine de France fille du Roy Charles sixiesme, portant le contract de mariage clause expresse d' exheredation de Charles son fils, en faveur des enfans qui naistroient de ce mariage. Et en l' an mil quatre cens vingt deux ces deux Roys estans decedez, Henry sixiesme leur fils fut qualifié Roy de France, & le Duc de Bethfort son Oncle, regent pendant la minorité de son Neueu (: nepueu), commanda absolument dedans Paris jusques en l' an mil quatre cens trente six que le Roy Charles VII. fils de Charles VI. y entra. Et ne faut faire aucune doubte que jusques à ce periode il semble que l' Escole Anglesche perdit son credit, ny ne changea de nom. Tellement que si par advis de pays il falloit examiner cette histoire, on pourroit dire que quand les portes de Paris furent ouvertes au Roy Charles VII. elles furent d' une mesme main fermées aux Anglois ses ennemis capitaux. Toutesfois cette histoire est d' une plus longue haleine, dont je me suis voulu esclaircir au mois d' Octobre 1612. par les mains de Maistre Jan Cecile Frey Procureur, Pierre Valens Doyen, & Jean Bidaut receveur de la nation d' Allemagne, qui me communiquerent leurs vieux Registres, par lesquels nous trouvasmes ensemblement que de toute ancienneté les congregations de cette nation, qui se faisoient aux Mathurins, estoient sous le nom de l' Anglicane, jusques au dernier Registre qui commençoit l' annee 1425. dedans lequel je voy commencement de changement en l' an 1431. Ces quatre nations contiennent sous soy diverses provinces, & nommement sous la nation Anglesche estoit comprise celle d' Allemagne qui ne tenoit pas petit rang & authorité en cette Escole, ains se parangonnoit à l' Anglesche, de maniere que l' an mil quatre cens & trente un sous un Albert de Bourdon Gueldrois, Procureur de cette nation, s' estant tenuë aux Mathurins une congregation, elle est recognuë par le Registre avoir esté faite par la nation d' Allemagne. Facta congregatio nationis Allemaniae apud sanctum Mathurinum (porte le texte) die quinta Maij 1431. Alberto de Gourdan procuratore dictae nationis Baccalaureo ex Theologia nato de campis. C' est au pays de Gueldre.

Et le semblable au mois de Septembre ensuivant. Facta congregatione nationis Allemaniae (porte le Registre) apud sanctum Mathurinum vigesima Septembris 1431. Magistro Conrado Wildam Saltis burgensis Diocesis procuratore. C' est la ville de Ratinberg. Ny pour cela les Anglois ne laissoient d' estre tousjours enfans de l' Université, se faisans les congregations tantost sous le nom de la Faculté d' Angleterre, tantost sous celuy d' Allemagne. Brief depuis l' an mil quatre cens trente & un jusques en l' an mil quatre cens trente & six, par une contrecarre d' elections, tout ainsi que vous voyez ores l' Alleman, ores l' Anglois, estre eleus Procureurs de cette nation Angleche (Anglesche), aussi voyez vous les congregations porter sur leur frontispice tantost le nom de la nation d' Allemagne, tantost d' Angleterre. Et le dernier Anglois Procureur avant l' entrée du Roy Charles septiesme dans Paris, fut un Ollanus Magnus, personnage de quelque recommandation selon la portée du temps.

Chose vrayement admirable, ains miraculeuse, que je ne puis passer sous silence sans encourir marque d' ingratitude envers ma patrie, que lors que les Anglois penserent avoir atteint au comble de leurs heurs dedans nostre France, ce fut lors qu' ils commencerent de cheoir. Le plus grand contentement qu' ils eurent chez nous pendant le regne de leur jeune Roy, fut la prise qu' ils firent au siege de Compiegne de nostre Jeanne la Pucelle: En faveur de laquelle ils chanterent un Te Deum laudamus dedans l' Eglise nostre Dame de Paris, pour action de graces à Dieu: & ores que prisonniere de guerre, toutesfois son procés criminel luy fut fait & parfait, pour se vanger de la honte qu' elle leur avoit procuree, faisant fidele service à son Roy. Et par sentence du troisiesme jour de May mil quatre cens trente & un, renduë par l' Evesque de Beauvais, elle fut declaree Heretique relapse, & ordonné qu' elle seroit mise és mains du bras seculier. Veit-on jamais traict de prosperité plus benin que cestuy, & toutesfois Dieu voulut que le cinquiesme du mesme mois & an, deux jours apres la sentence, les Anglois possedans encore la ville de Paris, commencerent de se voir descheuz de l' ancienne dignité qu' ils avoient en l' Université. Premier & fatal prognostic de leur cheute future: tant avoit sur eux de pouvoir l' influence de nostre Pucelle.

Et neantmoins ne pensez pas qu' à l' arrivee du Roy Charles septiesme dedans Paris, l' Anglois fust tout à fait exterminé de son ancienne Escole: Car combien que de là en avant toutes les congregations se fissent sous le nom de la nation d' Allemagne; toutesfois j' en trouve une pendant la procure d' Alberic Textoris du sixiesme jour de Decembre mil quatre cens quarante & un, & une autre pendant celle de Goda Holandois, avoir esté faicte sous le nom de la nation Anglesche. Toutes les autres du depuis jusques à huy sous celuy de la nation de Allemagne: & ne verrez aucun Anglois promeu à la dignité de Procureur, ains seulement Alleman. Or le premier qui en fut pourveu depuis l' entree du Roy Charles, fut le mesme Arbert de Bourdon Gueldrois, dont j' ay parlé cy-dessus. Cestuy avoit premier franchy le pas en l' an mil quatre cens trente & un, au prejudice des Anglois, & luy-mesme fut le premier honoré de cette Procure sous le Roy Charles, par une je ne sçay quelle fatalité. Parce que le nom de Bourdon en Aleman signifie fin. Comme celuy auquel devoit prendre fin aux Escoles la nation Anglesche. Et depuis les Allemans ayans empieté cette dignité, firent razer du frontispice des Escoles, tout ce qui concernoit l' Anglois, & graver l' Aigle, & l' image de l' Empereur Charlemagne, non comme fondateur de l' Université, ains comme leur particulier patron, tirant son extraction de la nation Germanique.

lundi 22 mai 2023

Chapitre X. Que les Romains presagissoient la ruine de leur Empire devoir venir de la Germanie:

Que les Romains presagissoient la ruine de leur Empire devoir venir de la Germanie: & de quelque fatalité qu' il y a eu en ce pays là, pour le declin de l' Empire. 

CHAPITRE X. 

Si je ne m' abuse, j' ay noté deux passages dans Cesar, par lesquels il semble taisiblement monstrer qu' il eut en grand doute les Germains: quoy que soit que tous ses desseins tendoient à ne permettre qu' ils s' empietassent tant soit peu de quelque pays limitrophe au Romain: craignant que ce ne leur fust occasion à entreprise plus hardie au dommage de la Republique de Rome. Au premier livre de ses Memoires de la Gaule, vous trouverez qu' estant venu à chef des Helvetiens (que nous appellons ores Souisses) & les ayant pris à mercy, il leur commanda de retourner en leur pays, & de rebastir leurs villes, qu' ils avoient auparavant arses, en intention de se rendre paisibles possesseurs de la Gaule. Et fut induit Cesar à ce faire, comme il dict, pour autant qu' il ne vouloit que ce pays demeurast longuement en friche : craignant que ce ne fust occasion aux Germains, de se desborder de leurs limites, & s' emparer de ceste contree là, qui estoit contiguë à la Provence, lors subjecte au peuple Romain. Et peu apres au mesme livre, oyant Cesar qu' Ariovist Germain avoit occupé quelques terres du Sequanois, voulant contre luy entreprendre le party & protection de la Gaule (comme il disoit, mais en verité pour le profit de luy ou de sa patrie, comme l' effect demonstra) apres quelques propos par luy desduits sur la cause & motif de son entreprise, il adjouste tour* main: Et d' accoustumer, dit-il, petit à petit les Germains à outrepasser le Rhin, & aborder en la Gaule avec grand nombre de gend'armes, * i lluy sembloit être chose fort chatoüilleuse, speciallement pour le peuple Romain. Attendu que ces hommes barbares & farouches, s' estans apprivoysez de la Gaule ne s' en garderoient jamais, non plus qu' auparavant les Cimbres & Teutones, qu' ils ne donnassent jusques en la Provence, & de là jusques en Italie. De ce passage j' apprens deux choses, dont l' une n' appartient au present subjet, mais est-ce neantmoins notable pour les Princes & grands Seigneurs, qui doivent sur tout empescher que leurs voisins, & ceux dont à la longue ils pourroient encovrir meschef, ne s' agrandissent facilement pres de leurs portes, encores que pour l' heure presente ceste grandeur ne se tourne à leur des-advantage: mais ayans plus d' esgard à l' advenir qu' au present, ils repensent que la convoitise des hommes est sans bride, & que jamais ne trouve assouvissement: si que plus ils croissent en auctorité & grandeur, plus veulent-ils s' augmenter en accroissement de pays. Ceste maxime fut fort bien entenduë par Cesar, & depuis par ceux, qui ont eu quelque commandement au pays d' Italie, lesquels sont coustumiers faire ligues pour supprimer & ancantir la puissance de celuy qu' ils voyent trop heureusement prosperer, iaçoit que (peut-être) sur son advenement ils favorisassent son party: comme de la memoire de nos ayeux advint au Roy Charles huictiesme en son voyage de Naples. Quant au discours du present chapitre, vous pouvez voir par ces deux passages que les Romains avoient ja les Germains pour suspects, comme gens du tout aguerris & exposez au faix & travail de la guerre. Au moyen de quoy ce gentil Jules Cesar, d' un esprit militaire, & prevoyant de longue main le desastre, qui par eux pouvoit advenir à l' Empire, leur vouloit coupper toute broche, & oster tout moyen de sortir hors de leur pays. Chose que depuis ses successeurs curent en mesme recommandation. Car estant l' ordre de la Republique devolu en la personne d' un seul, ils entretindrent bien longuement le long du Rhin sept ou huict legions Romaines, tantost plus, tantost moins, selon les occasions, esquelles consistoit la plus grande force de l' Empire, tant pour livrer la guerre aux Germains, que pour leur être un perpetuel retenail aux courses qu' ils eussent peu faire sur le territoire du Romain, & leur barrer le travers de la riviere du Rhin. Et toutefois je ne sçay quel heur il y a euen ce païs de Germanie: car encor que la plus part des progrés des Empereurs feussent fichez celle-part, si n' eurent-ils jamais fortune si favorable, qu' ils s' en peussent dire seigneurs & maistres: au contraire y recevrent plusieurs grandes hontes & routes: comme fut sa desconfiture du temps d' Auguste des trois legions souz la conduite de Quintile Vare, qui fut telle, qu' àpeine en reschappa-il un seul pour en venir rapporter nouvelles. Et mesmement quant à Jules Cesar, combien qu' il fust l' un des premiers qui osa percer jusques à eux, toutesfois il ne les feit que recognoistre sans coup ferir: & encor racompte-l'on entre un de ses mal-heurs, qu' il y perdit deux de ses principaux Capitaines, Titie, & Aronculeie. Bien est vray, que Germanic & plusieurs autres Princes de Rome leur dresserent maintes escarmouches, toutesfois jamais fortune ne permist qu' ils s' en rendissent paisibles. Mesmement incontinent qu' ils les laisserent plus que de coustume en requoy (qui fut apres la transmigration de Constantin à Bizance) soudain se trouverent ces Germains dresser à l' Empire Romain cent mille trousses & algarades, ayans defois à autre du pire, mais ordinairement plus du bon: tant que finallement apres avoir esté long temps d' une part & d' autre en balance, ils demembrerent petit à petit de ce grand Empire une grande partie de leurs Provinces. Soubs Honore, & apres souz l' un des Valentiniens les Vandales, Sueves & Allains occuperent les Espagnes: les Gots qui confinoient à l' Allemaigne, l' Aquitaine: les Bourguignons, les Sequanois: les François, la Gaule Celtique: les Pictes & Escossois, celle partie de la grande Bretaigne dicte Escosse: les Anglois & Saxons, l' autre partie que nous appellons de leur nom Angleterre: & les Lombards souz Justin, la Gaule qui estoit par les Italiens appellee Cisalpine

Voire qu' il semble (voyez que peut une opiniastreté fichee au cerveau d' un peuple usité à la guerre) qu' estant venu à neant tout l' honneur & Empire de Rome, & depuis relevé par nostre Charlemaigne, toutesfois si ont-ils voulu tirer devers eux encor ce tiltre d' Empereur, quasi comme derniere despoüille de la grandeur des Romains. Et la plus grand part des Royaumes, qui depuis furent, & encor sont en vogue a au Ponant, prindrent leur origine d' eux. Lesquels estans policez de la façon qu' ils sont aujourd'huy, je puis dire que tout ainsi que les Jardiniers entent sur sauvageons, greffes dont le fruict est soüef, & du tout contraire à son pié: aussi des gens brusques & grossiers (je les nomme grossiers, en esgard aux conditions qu' ils avoient, quand ils s' esparpillerent parmy les nations estrangeres) sont yssuës les Monarchies, comme la nostre Françoise, l' Espagnolle, & l' Angloise, qui florissent en bonnes coustumes & ordonnances, sur toutes autres nations.