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jeudi 20 juillet 2023

6. 32. D' un amour prodigieux de Charlemagne envers une femme.

D' un amour prodigieux de Charlemagne envers une femme.

CHAPITRE XXXII.

Apres avoir discouru cy-dessus des assassins du corps, il ne sera hors de propos de parler des assassins de nos ames. Car si nous croyons aux Poëtes l' amour est le meurdre d' icelles. François Petrarque fort renommé entre les Poëtes Italiens, discourant en une Epistre son voyage de France, & de l' Allemagne, nous raconte que passant par la ville d' Aix, il apprit de quelques Prestres une Histoire prodigieuse qu' ils tenoient de main en main pour tres-veritable. Qui estoit que Charles le Grand, apres avoir conquesté plusieurs pays s' esperdit de telle façon en l' amour d' une simple femme, que mettant tout honneur & reputation en arriere, il oublia non seulement les affaires de son Royaume, mais aussi le soing de sa propre personne, au grand desplaisir de chacun: estant seulement ententif à courtiser cette Dame: laquelle par bon-heur commença à s' aliter d' une grosse maladie qui luy apporta la mort: Dont les Princes, & grands Seigneurs furent fort resjoüis, esperans que par cette mort, Charles reprendroit comme devant, & ses esprits & les affaires du Royaume en main: Toutes fois il se trouva tellement infatué de cet amour, qu' encores cherissoit-il ce cadaver, l' embrassant, baisant, accolant de la mesme façon que devant, & au lieu de prester l' oreille aux legations qui luy survenoient, il l' entretenoit de mille bayes, comme s' il eust esté plein de vie. Ce corps commençoit desja non seulement à mal sentir, mais aussi se tournoit en putrefaction, & neantmoins n' y avoit aucun de ses favoris qui luy en osast parler: dont advint que l' Archevesque Turpin mieux advisé que les autres, pourpensa que telle chose ne pouvoit estre advenuë sans quelque sorcellerie. Au moyen dequoy espiant un jour l' heure que le Roy s' estoit absente de la chambre commença de foüiller le corps de toutes parts, finalement trouva dans sa bouche au dessous de sa langue un anneau qu' il luy osta. Le jour mesme Charlemagne retournant sur ses premieres brisees, se trouva fort estonné de voir une carcasse ainsi puante. Parquoy, comme s' il se fust resveillé d' un profond sommeil, commanda que l' on l' ensevelist promptement. Ce qui fut fait: mais en contr'eschange de cette folie, il tourna tous ses pensemens vers l' Archevesque porteur de cet anneau, ne pouvant estre de là en avant sans luy, & le suivant en tous les endroits. Quoy voyant ce sage Prelat, & craignant que cet anneau ne tombast és mains de quelque autre, le jetta dans un lac prochain de la ville. Depuis lequel temps on dit que ce Roy se trouva si espris de l' amour du lieu, qu' il ne desempara la ville d' Aix, où il bastit un Palais, & un Monastere, en l' un desquels il parfit le reste de ses jours, & en l' autre voulut estre ensevely. Ordonnant par son testament que tous les Empereurs de Rome eussent à se faire sacrer premierement en ce lieu. Que cela soit vray, ou non, je m' en rapporte, tout ainsi que le mesme Petrarque, à ce qui en est. Si estoit ce un commun bruict, qui lors couroit en la ville d' Aix, lieu où reposent les os de Charlemagne. De laquelle histoire ou fable, Germantian a fort bien sceu faire son profit, pour averer, & donner quelque authorité à l' opinion de ceux qui soustiennent les malins esprits se pouvoir enclorre dans des anneaux. Or que Charlemagne fust grandement adonné aux Dames sur la fin de son âge, mesmes que ses propres filles, qui estoient à sa suitte, fussent quelque peu entachees du peché d' amourettes, Aimoïn le Moine vivant du temps du Debonnaire nous en est tesmoin authentique: Qui dit qu' à l' advenement de Louys Debonnaire à la Couronne, la premiere chose qu' il eut en recommandation fut de bannir de sa Cour les grands troupeaux de femmes qui y estoient demeurees depuis le decez de feu son pere: & aussi de confiner en certains lieux ses sœurs, qui ne s' estoient peu garentir de mauvais bruits, pour la dissoluë frequentation qu' elles avoient eüe avecques plusieurs hommes.

samedi 1 juillet 2023

5. 2. Que la mort de Bernard Roy d' Italie petit fils de l' Empereur Charlemagne fut une mort d' Estat,

Que la mort de Bernard Roy d' Italie petit fils de l' Empereur Charlemagne fut une mort d' Estat, contre l' opinion commune de nos Historiographes.

CHAPITRE II.

Charlemagne auparavant que de mourir avoit faict Pepin son fils aisné, Roy d' Italie, & Louys son puisné Roy d' Aquitaine. Ce fut une Loy depuis observee en cette famille, qu' à l' aisné qui devoit succeder à l' Empire estoit donné le Royaume d' Italie, voire dés le vivant du pere mesme. Ainsi fut-il baillé par l' Empereur Louys le Debonnaire, à Lothaire son fils aisné, ainsi par le mesme Lothaire à Louys aussi son aisné. Le tout de la mesme façon que nous appellons aujourd'huy Roy des Romains, celuy est destiné à l' Empire apres la mort de l' Empereur: Tiltre qui a esté emprunté de cette longue ancienneté. Car entre le Roy d' Italie & des Romains, il n' y avroit pas grande difference qui accompagneroit le Roy des Romains de l' effect. Advint que le Roy Pepin meurt du vivant de Charlemagne son pere, & par sa mort transmit le Royaume d' Italie à Bernard son fils: Auquel consequemment si le droict de representation eust lors eu lieu, la Couronne Imperiale estoit deuë. Nos Historiographes nous enseignent que Louys dés le vivant de son pere avoit esté par luy associé, & faict compagnon de son Empire. De moy, je le veux croire avec eux, encores que le Prince Nitard petit fils de Charlemagne par sa fille Berthe, n' en face aucune mention en sa vie, Regnavit (dit-il parlant de Charlemagne) per annos duos & triginta, Imperijque gubernacula cum omni foelicitate per annos quatuordecim poßedit. Haeres autem tantae sublimitatis Ludovicus filiorum eius ex iusto matrimonio susceptorum novissimus, caeteris decedentibus succeßit. Qui ut pro certo patrem deceßisse comperit, Aquas ab Aquitania protinus venit, quo undique ad se venientem populum suae ditionis addixit. S' il eust esté fait Empereur dés le vivant du pere, ce placard meritoit bien d' estre icy enchassé. Et à vray dire, qui prendroit ce passage par la simple lettre, sans y apporter quelque commentaire, il sembleroit que Louys demeurant dedans l' enceinte de France, ayant eu les premieres nouvelles de la mort de son pere, eust gaigné le devant de Bernard son nepueu qui residoit en Italie, & l' eust supplanté de la benediction de son ayeul.

Or combien que je ne vueille pas aisément desdire en cet endroit l' opinion commune de cette association d' Empire, toutesfois je soustiendray librement, que jamais il n' y eut chose qui affligea tant l' Empereur Louys en son ame, que Bernard, lequel il fit quelque temps apres mourir, feignant qu' il s' estoit voulu rebeller contre luy. Qui estoit une accusation supposee pour apporter quelque excuse à cette mort. Je sçay bien qu' à cette parole j' arresteray tout court le Lecteur, pour estre le premier de ce nom qui mette cette opinion en avant. Je ne me veux point icy chatoüiller: mais voyez si mes conjectures sont bonnes, que j' emprunte de ceux mesmes qui accusent Bernard de rebellion.

Premierement la question n' est pas petite de sçavoir si ce crime de rebellion pouvoit tomber en celuy, qui se pouvoit pretendre estre fondé en juste tiltre par le moyen du droict d' ainesse qu' il pensoit estre fondu en luy par la representation du Roy Pepin son pere, fils aisné de Charlemagne. Mais laissant cette particularité en arriere, qui estoit toutesfois le motif de la crainte du Debonnaire, ceux qui nous ont redigé sa vie par escrit, disent que ce Bernard reduit aux termes de desespoir, voyant son oncle s' armer contre luy, le vint trouver en cette France, & se prosternant à ses pieds, le supplia tres-humblement de luy vouloir pardonner sa faute: comme feirent semblablement tous ses complices, & entre autres un Reginard son Connestable: Toutesfois qu' ils ne le peurent de luy obtenir, ains furent mis entre les mains de la justice, qui condamna entre les autres, Bernard à mort, & que l' oncle meu de pitié, voulut qu' il eust seulement les yeux creuez, dont ce jeune Prince indigné, mourut trois jours apres de regret. Voila le courant de cette histoire. Par tout le discours de la vie de Louys le Debonnaire, on le represente un Prince calme le possible, lent & tardif à se courroucer, prompt à se reconcilier, enclin à la misericorde, qui ne refusa jamais pardon à celuy qui luy demandoit, quelque conjuration qu' il eust auparavant brassee. Ainsi en usa-il envers Guinemark qui avoit fait revolter la Bretaigne contre luy: Ainsi à l' endroict de Berca Comte de Barcelone convaincu de crime de leze Majesté: ainsi à ceux qui avoient suivy le party de Lothaire son fils, commuant la condamnation de leurs morts en bannissemens, & ainsi à une infinité d' autres Seigneurs factionnaires. Bernard seul se trouva ne pouvoir joüir de cette clemence, lequel se tenant clos & couvert dedans son Royaume d' Italie, pouvoit longuement amuser les forces de l' Empereur, qui mieux aimoit le repos d' une Chambre, que la poussiere des champs, toutesfois comme asseuré de sa conscience, il se vint jetter entres ses bras: dont vient que l' oncle fut chiche de sa misericorde envers son nepueu, luy dis-je, qui en estoit prodigue envers ceux qu ne luy attouchoient de proximité de lignage. Je n' en rendray point la raison, ains le lairray juger par celuy, qui non preocupé d' opinion, se donnera le loysir de me lire. On me dira que pour me flater j' adjouste icy à la lettre, & que Bernard ne se presenta à l' Empereur, que lors qu' il ne sçavoit plus de quel bois faire fleches. Belle objection vrayement, qui la pourroit lier avecques ce qui s' estoit passé. Car quand Bernard vint en France, il n' avoit encores senty aucuns efforts de la guerre, ains seulement sur un bruit que son oncle s' armoit souz un faux donner à entendre que Bernard s' estoit remué contre luy. Tout cela, ce sont paroles (me dira quelque autre) bonnes à estre contestees en un barreau par des Advocats qui combatent pour la vraysemblance, & non pour la verité. Or entendez je vous prie ce que j' ay maintenant à vous dire. Charlemagne, outre Pepin & Louys ses deux enfans legitimes, avoit trois bastards, Dreux, Hugues, & Thierry. Voyez ce qu' en recite Nytard duquel je fais tres-grand fonds en cette histoire: lequel apres avoir touché, & la venuë de Louys en la ville d' Aix, & la reception qui luy fut faite par ses sujets, comme je l' ay icy dessus representé, dit ainsi: Fratres quoque adhuc tenera aetate Draconem, Hugonem, & Theodoricum participes mensae esse, quos & in Palatio una secum nutriri praecepit, & Bernardo nepoti suo Pepini Regnum Italiae conceßit. Qui quoniam paulò pòst, ab eo defecit, capitur, & à Bertmondo Lugdunensis provinciae praefecto luminibus pariter & vita privatur. Hinc autem metuens ne post dicti fratres, populo solicitato eadem facerent, ad conventum publicum eos venire praecepit, totondit, ac sub libera custodia commendavit. Pour le regard des bastards, on voit à l' œil une moinerie, ou pour mieux dire mommerie d' Estat, pardevant un Parlement & assemblee generale des Princes & grands Seigneurs: Et quant à la mort de Bernard, il y apporte quelque excuse en cette parole Defecit, comme aussi escrivant l' Histoire de son temps, & de son oncle, il luy eust esté aucunement mal seant de ne donner quelque lustre à cette mort. Mais le subsequent des bastards me fait juger de l' antecedant pour Bernard, & qui me fortifie plus en mon opinion, c' est que l' autheur qui donna entre les anciens plus de façon à cette histoire de rebellion, nous enseigne que le Debonnaire quelque temps apres espoint d' un bon instinct de sa conscience, en un solemnel Parlement qu' il tint en son Palais d' Attigny, fit confession & penitence publique de ces deux fautes par luy commises. Anno subsequenti (dit cet Autheur) domnus Imperator conventum generalem coire iußit in loco cuius vocabulum est Attiniacus: In quo, convocatis ad concilium Episcopis, Abbatibus, spiritualibusque viris, necnon Regni sui proceribus, primo quidem fratribus reconciliari studuit, quos inuitos attonderi fecerat. Post haec autem palam se erraße confessus, & imitatus Imperatoris Theodosij exemplum, poenitentiam spontaneam suscepit, tam de his, quam quae in Bernardum proprium nepotem gesserat: S' il y avoit eu de la rebellion au nepueu, il ne falloit point de penitence à l' oncle. La juste condamnation de l' un estoit la justification de l' autre. Et à peu dire entre les chefs, pour lesquels il fut depuis degradé de sa dignité Imperiale par le Clergé dedans la ville de Soissons, à l' instigation de Lothaire son fils aisné, cestuy concernant ses freres & son (neueu) nepueu estoit le premier. Eo quod fratribus & propinquis (portoit le narré de l' arrest) violentiam intulerit, & nepotem suum, quem ipse liberare poterat, interficere permiserit. Passage qui ne porte pas que l' Empereur eust fait mourir le Roy son (neueu) nepueu, ains que le pouvant empescher il ne l' avroit fait. Qui monstre qu' en cette mort il y avoit plus du fait des hommes, que de Dieu, ou de la Justice. Aussi estoit-ce l' un des points que Thegan coadjuteur de l' Evesque de Triers, reprenoit en luy particulierement, que pendant que comme devot il s' amusoit trop à Psalmodier, & comme adonné aux bonnes lettres, il consommoit la meilleure partie du temps à la lecture des livres, ses conseillers & favoris luy faisoient acroire tout ce qu' ils vouloient. Omnia cautè & prudenter agens (dit cet Autheur parlant de luy) nihil indiscretè faciebat, praeterquam quod consiliarijs suis magis credidit quàm opus esset. Quod ei fecit Psalmodiae occupatio, & lectionum aßiduitas.

Bernard ayant esté occis, son corps fut porté en la ville de Milan, où il repose. Et combien que toute l' Italie fust de là en avant du tout exposee sous la puissance du Debonnaire, & que la mort du jeune Prince fust excusee par les courtizans, sous le pretexte de rebellion, toutesfois au veu & sceu de l' Empereur on l' honora de cet Epitaphe dans la principale Eglise: Bernardus civilitate mirabilis, caeterisque pijs virtutibus inclytus Rex, hic quiescit. Regnavit an. 4. Mens 5. Obiit 15. Cal. Maij indict. II. filius piae memoriae Pepini. Epitaphe, si je ne m' abuse, qui faisoit le procez au procez qu' on luy avoit fait. Et qui me fortifie de plus en plus à mon opinion, c' est qu' Adon Evesque de Vienne qui florit vers le temps de Charles le Chauve, & s' estoit du tout voüé à la celebration de cet Empereur, se donna bien garde en sa Chronique de parler, ny de la mort de Bernard, ny de la degradation des trois freres bastards, comme estans pieces qu' il ne pouvoit debiter sans obscurcir cette histoire. Ce Roy Bernard laissa un fils unique, nommé Pepin, qui eut trois enfans, Bernard, Pepin, & Heribert Comte de Vermandois (que le commun de nos Annales appelle par abreviation Hebert). Cestuy entres autres siens enfans eut un Aldebert fils puisné. D' un autre costé Louys le Debonnaire fut pere de Charles le Chauve, duquel nasquit Louys le Begue, & de luy Charles le simple. Admirable justice de Dieu qui se trouve entre ces deux familles. Car soit, ou que pour asseurer son Estat souz le masque de rebellion, ou non, Louys le Debonnaire eust consenty à la mort du Roy Bernard son nepueu, tant y a que ceste playe saigna longuement.

Parce que Dieu voulut en ramantevoir la vangeance en la troisiesme generation de l' une & de l' autre famille, je veux dire jusques à Charles le Simple, que Heribert fit mourir dedans les prisons de Peronne: Et pour accomplissement de vangeance (chose pleine de honte & pudeur) Ogine veufve de Charles, convoia en secondes nopces avec Aldebert fils d' Heribert. Qui estoit assassiner tout à fait la memoire de son mary. En effet voila quel jugement je fais de cette Histoire, que je supplie tout favorable Lecteur vouloir prendre de bonne part.

lundi 19 juin 2023

3. 23. De l' Université de Paris.

De l' Université de Paris

CHAPITRE XXIII. 

Quand je considere à part moy comme les affaires de l' Eglise Romaine, & Gallicane se passerent depuis le regne de S. Louys, cecy me fait souvenir des divisions qui furent dans la ville de Rome fort familieres entre le Senat & les Tribuns, esquelles pendant que le Senat soustenoit son authorité encontre le peuple, & les Tribuns combatoient pour la liberté populaire contre la grandeur du Senat, ils furent par les grands appellez seditieux, & perturbateurs du repos public: & toutesfois ceux qui à meilleures enseignes, & sans passion ont discouru de ceste Republique, sont d' advis que dans ces dissensions se trouva l' entretenement de son repos & grandeur: Parce que les questions que les Tribuns mouvoient aux premieres rencontres faisoient que les Consuls, & Senat estoient plus retenus en leurs actions. Parquoy demouroit chacun en cervelle, & dans les bornes de son devoir: Tellement que par ce contrepoids florit longuement ceste Republique. Ainsi en est-il advenu à nos deux Eglises. Car si vous parlez à celuy qui est seulement nourry en Cour de Rome, il dira que l' Eglise Gallicane a esté perturbatrice du repos general de l' Eglise Romaine, pour s' estre opposee aux entreprises du Pape: Aussi n' approuvent-ils dans Rome nos maximes en cest endroict: & neantmoins s' il vous plaist approfondir toutes choses à leur vray poinct, vous ne ferez nulle doute qu' à ceste France ne soit deuë la restauration generale de l' Eglise Romaine. Car qui eust laissé en ceste façon fluctuer toutes les affaires, comme elles faisoient, certainement le siege de Rome voulant prendre son vol trop haut, se fust abysmé. Et de fait, encores n' y sceumes nous donner si bon ordre, qu' il n' y ait perdu de ses plumes. Car le grand schisme de trente huict à quarante ans, & les miserables exactions qu' il produisit, aliena du tout le cœur des Bohemiens, de la Papauté, & excita par mesme moyen l' heresie Hussienne, laquelle bien qu' elle semblast être estainte pour quelques annees, si est-ce que tout ainsi que le feu couvert sous une chaude cendre, se descouvrant, produit une chaleur plus forte qu' auparavant: aussi ceste mesme opinion ayant repris air par la venuë de Luther, a depuis eslongné du Pape presque toute l' Allemagne, l' Angleterre, & l' Escosse, du sein de nostre Eglise: Luther, dy-je, prenant mesme fondement que Jean Hus, sur je ne sçay quels abus du Pape Leon X. Nous seuls qui perpetuellement avons fait teste à l' Eglise de Rome en tels accessoires, sommes toutesfois demourez ses tres-humbles, & tres-obeïssans enfans. Quand je dis nous, j' entends nos Roys, Prelats, Princes, grands Seigneurs, Cours de Parlemens, qui sont les principaux nerfs de la Republique Françoise. Car quant au peuple, encores que le malheur de ce temps nous ait divisez en deux Religions, si est-ce qu' il y en a sans comparaison beaucoup plus de secteteurs de l' ancienne. Tellement que l' on peut dire justement (car la verité est telle) que tant s' en faut que par les privileges, & libertez de nostre Eglise, nous soyons autres que nous devons envers l' Eglise Romaine, qu' au contraire c' est par une grande abondance d' humilité, & obeïssance envers le S. Siege, que nous les appellons privileges: veu que ceste liberté tant rechantee par les nostres, n' est autre chose que le droict commun, & ordinaire. Et c' est la cause pour laquelle chacun par un commun consentement, s' est induit d' appeller les Evesques, Ordinaires, comme ne faisans riens dans leurs Dioceses, qui ne fust de droict ordinaire, & que ce que l' on entreprenoit sur eux, estoit extraordinaire. Or parce qu' en ceste devote discorde des deux Eglises, qui ne tendit jamais qu' à une union, & accord, l' Université de Paris ressembla les Tribuns de Rome (car & l' un, & l' autre, par honnestes concions, & harangues, excita chacun à son devoir) il me semble qu' elle merite bien que nous luy donnions un chapitre, pour descouvrir, non ce qui est de son menage (cela se verra au plaidoyé que je fis pour elle 1564.) mais de son ancienneté, & du grand lieu qu' elle tint autresfois par la France. 

Ceux qui en ont parlé devant moy, disent que l' Empereur Charlemagne en jetta les premieres traces, & qu' estans arrivez quatre Anglois, ou Escossois, disciples du venerable Beda, en France, Alcuin, Rabam, Jean, & Claude, surnommé Clement, qui crioyent qu' ils avoient de la science à vendre, cest Empereur les ayant ouys, à leur instigation, & semonce, establit dans Paris une Université, où ces quatre grands Docteurs donnerent les premiers advancemens, & progrés aux bonnes lettres. C' est l' opinion de Robert Gaguin, puis de Nicolas Gilles, & de Boëce historiographe Escossois, lequel, pour illustrer sa patrie, dit que l' Université de Paris doit à l' Escosse son commencement, & que Clement fut Escossois. Certes je veux croire que Alcuin homme docte, selon la portee de son temps, a esté à la suitte de Charlemagne: Mais que ceste Université ait jamais esté fondee par cest Empereur, je ne me le suis jamais peu persuader, encores que pour ne me desmouvoir de ceste commune opinion, j' aye voulu rechercher pour elle tous les advantages que l' on luy sçavroit donner. Car ce ne seroit pas petite rencontre pour l' exaltation de nostre ville, que l' Université eust un tel parrain, comme ce grand Prince. Toutesfois je ne voy, ny qu' Eguinarth, ny Aimoïn, ny Rheginon, ny Adon, ny Sigebert en facent aucune mention. Car quant à l' histoire qui court sous le nom de Turpin, indubitablement elle est supposee par quelques Religieux de sainct Denis, & neantmoins encores n' en parle-elle point. Chose qu' à mon jugement ils n' eussent escoulé sous silence, s' il en eust esté quelque cas, estant ceste fondation non moins digne de commemoration, voire plus que plusieurs autres particularitez, qu' ils ont songneusement deduictes, en recitant ses faicts, & gestes. Mesmes qu' Eguinarth, qui a fait sa vie, semble avoir laissé aux autres historiographes la deduction des exploicts militaires de cest Empereur, & pris pour son partage seulement ce qui regardoit le sçavoir, & bonnes lettres, qui estoient en cest Empereur, nous discourant qu' il avoit esté nourry non seulement en sa langue naturelle, mais aussi en plusieurs estrangeres, & specialement que la Latine luy estoit aussi familiere comme sa langue maternelle. Et quant à la Grecque, qu' il l' entendoit, ores qu' il ne la sçeust prononcer: comme pareillement il avoit esté instruict aux arts liberaux, en la Grammaire par Pierre Pisan, & aux autres disciplines par Albin, surnommé Alcuin: voire avoit l' intelligence de l' Astronomie: Qu' il fit la vie des Roys de France en vers: Donna à son vulgaire les noms des mois, & des vents: Qu' à ses repas, pour ne perdre temps, il se faisoit lire, ou reciter quelque belle histoire. Brief estant la plus belle remarque dont Eguinarth embelisse la vie de Charlemagne, que le soin qu' il avoit eu aux bonnes lettres, je ne me puis persuader, qu' il n' eust à la queuë de cecy parlé de ceste Université, s' il en eust esté fondateur, tant pour la dignité du lieu, où elle est establie (ancien sejour des Roys de France, dés l' advenement de Clovis) que pour l' excellence mesme d' un tel œuvre. Estant la plus belle closture que cest historien eust peu adjouster à la suitte d' une telle narration. Joinct que combien que par les loix, & ordonnances du Debonnaire, il soit enjoinct aux Evesques d' avoir escoles en leurs Eglises, suyvant ce qu' ils luy avoient promis de faire, au Parlement par luy tenu à Latigny, & que mesmes au Concil celebré sous Lothaire Empereur son fils, dedans la ville de Paris, soit fait pareil commandement. Toutesfois je ne trouve point que l' on se soit onques souvenu de ceste Université ny mesmement qu' elle ait jamais produit un seul homme de marque, ou un seul fruit sous toute la lignee de Charlemagne, ny bien avant sous celle de Hugues Capet. Et mesmes en la seconde partie de ce Concil tenu à Paris, article douziesme, les Evesques le prient, qu' en ensuivant les traces de son pere, & a fin qu' une intention si loüable du deffunct ne devint en friche, il voulust ordonner que sous son auctorité on establit des Escoles en trois villes les plus commodes du Royaume. Quoy faisant, il procureroit un grand bien, & honneur à l' Eglise, & quant à luy, qu' il se rendroit à tout jamais recommandable à la posterité. Ce Concil estant tenu dedans la ville de Paris, l' on parloit de l' institution des Escoles publiques, sous l' authorité du Roy. Si Paris eust ja receu cest honneur d' avoir une Université de la main de Charlemagne, il ne me peut entrer en teste que l' on n' en eust fait expresse mention, pour exciter Lothaire Empereur à faire le semblable. Adjoustez que descendant beaucoup plus bas, on n' en trouve un seul mot dedans S. Bernard, homme studieux le possible, & dans les œuvres duquel on recueille plusieurs choses, qui appartiennent à l' ancienneté. Bien escrit-il à Hugues de S. Victor, qui lors estoit en estime dedans Paris. (Car vers ce temps commençoient les lettres de poindre dans ceste ville) & encores s' atacha-il à Pierre Abelard grand personnage, fors qu' il tenoit quelques propositions erronees: Mais qu' il nous ait jamais baillé le moindre esclair, dont nous puissions recueillir je ne sçay quoy de la fondation ancienne de ceste Université, il n' y en a riens. Toutes lesquelles raisons me font non seulement penser, ains croire, qu' en nos historiographes il y a eu pareil erreur au discours de l' Université, comme des Parlemens, & Pairs de France: & neantmoins erreur grandement loüable, d' avoir rapporté l' origine de ces trois grands Ordres à un si grand patron, que l' Empereur Charlemagne.

Mon opinion doncques est que ceste Université commença de jetter ses premieres racines sous Louys VII. & de les espandre grandement sous le regne de Philippe Auguste son fils, que l' on sçait entre nos Rois s' estre grandement addonné à l' establissement, & illustration de nostre ville, & sur tout, qu' elle en doit les premieres promotions à Pierre Lombard, Evesque de Paris, & à son Eglise: Evesque, puis-je dire, qui fut l' un des plus grands personnages de son Ordre. Opinion que je mis en avant dés l' an 1564. plaidant la cause de l' Université encontre les Jesuites. Non toutesfois que ceste Université ait esté fondee tout d' un coup, non plus que le Parlement, ny les douze Pairs: mais comme Dieu resueille les esprits sur un suject en un temps plus qu' en un autre, il semble que les lettres vers ceste faison commençassent à se desgourdir.

D' autant que sous le regime de Louys VII. vous eustes plusieurs personnages d' erudition tant dedans, que dehors la France. Et tout ainsi que ce siecle produisit plusieurs gens doctes, aussi se reveilla la devotion des Superieurs de l' Eglise en faveur des bonnes lettres. 

Sous la seconde lignee de nos Roys, je trouve dedans le second livre des Ordonnances de Louys le Debonnaire, en l' article 5. ces mots qu' il addresse au Clergé: Schola sane ad filios instruendos, sicut nobis præterito tempore ad Attiniacum promisistis, & vobis iniunximus, in congruis locis ad multorum utilitatem & profectum, à vobis ordinari non negligatur. C' est à dire: Je souhaite que suivant la promesse que me fites à Attigny, & ainsi que je le vous commanday, vous establissiez en lieux convenables des Escoles, pour l' instruction de la jeunesse, au profit & advancement de plusieurs. Toutesfois je ne voy point que sous ceste lignee, ce commandement fust de grand effect. Celuy qui porta plus de coup, fut le Concil general tenu en l' Eglise S. Jean de Latran dans Rome, sous Alexandre III. par lequel il fut ordonné que les Evesques avroient en chacune de leurs Eglises un precepteur à leurs gages pour enseigner tant la Theologie, que la Philosophie & autres bonnes lettres. En consequence duquel en un autre depuis tenu en la ville de Rheims sous Eugene III. du temps du Roy Louys VII. à l' instigation de S. Bernard il fut conclud & arresté touchant les erections des Escoles & estudes publiques en unes & autres villes. Ces commandements si souvent reïterez il ne faut faire nulle doute que la pluspart des Eglises se voulurent acquitter en cecy de leur devoir, & sur toutes celle de Paris, comme exposee au premier theatre de la France, sejour ordinaire de nos Roys. Et lors se firent deux grands partis dedans Paris en faveur des bonnes lettres: l' un en l' Eglise Cathedrale, l' autre en l' Abbaye de S. Victor de fraische memoire lors bastie par Louys le Gros: laquelle sous le regne de Louys VII. son fils, fut un receptacle de gens d' honneur: tant en la faculté de Theologie, qu' autres bonnes lettres. Tesmoins uns Hugue, Adam, Richard, & l' autre Richard, tous surnommez de sainct Victor, parce qu' ils estoient Religieux de S. Victor: tous quatre tres grands Theologiens, non despourveus de braves escoliers, comme l' on peut recueillir de l' Epitaphe d' Adam, gravé en l' airain dedans le cloistre.

Hares peccati, natura filius irae, 

Exiliique reus nascitur omnis homo. 

Unde superbit homo? cuius conceptio culpa, 

Nasci poena, labor vita, necesse mori. 

Vana salus hominis, vanus decor, omnia vana:

Inter vana nihil vanius est homine.

Dum magis alludit præsentis gloria vitae, 

Præterit, immo fugit: non fugit, immo perit.

Post hominem vermis, post vermem fit cinis, heu hex: 

Sic redit ad cinerem gloria nostra simul.

Hic ego qui iaceo miser, & miserabilis Adam,

Unam, pro summo munere, posco precem. 

Peccavi fateor, veniam peto, parce fatenti: 

Parce pater, fratres parcite, parce Deus.

Sous ces mots de pere & freres, il entendoit son Abbé & ses freres Religieux. Et certes j' oppose ceste piece à tous Epitaphes, tant anciens que modernes, & à tant soit que ce Religieux luy mesme se fust basty son tombeau pendant sa vie, ou quelqu'un de ses escoliers apres sa mort, nous pouvons de cest eschantillon juger que les bonnes lettres estoient lors à bonnes enseignes, logees dans ce monastere. Chose que vous pouvez encores recueillir de ceste belle & excellente Bibliotheque qu' ils y commencerent de bastir, & depuis par succession de temps enrichie de tous livres rares, tant celebree par nos anciens: Que si ces bons Religieux se rendoient lors recommandez parmy le peuple dedans leur Cloistre, hors la ville, par leurs estudes umbratiles: ne doubtez point que la grande Eglise exposee au beau milieu de la ville à la lumiere du Soleil, n' en voulust rapporter le dessus. Comme aussi est-ce la verité que l' on ne faisoit en ce temps-là exercice des lettres & des leçons qu' en la maison Episcopale, & ainsi l' apprenons-nous de Pierre Abelard, auquel j' ay voüé son chapitre cy apres: Auquel lieu y avoit adoncques deux grands Precepteurs, Maistre Anseaulme qui lisoit en la Theologie, & Guillaume Campellense, en Philosophie: sous lesquels le mesme Abelard fit ses premieres estudes: Ny pour tout cela n' estoit lors l' Université formee. C' estoit un Embrion que l' Eglise de Paris couvoit dans son sein pour en esclorre l' Université, de laquelle elle fut la mere, sous l' authorité de nos Roys: Et de là est venu que les degrez de Doctorie & licence, ont accoustumé d' être pris au logis de l' Evesque: & que le premier juge & censeur de la doctrine, & mœurs des escoliers, que nous appellons Chancelier de l' Université, est du corps des Doyen, Chanoines & Chapitre de ceste Eglise: De là aussi que tous les principaux de Colleges, Docteurs & Regens de l' Université, ne pouvoient entrer en lien de Mariage pendant leurs professions. Comme si les Principautez, Doctories, & Regences, eussent esté affectees à l' Eglise, dont elles avoient pris leur premiere source. Coustume qui fut estroittement observee par toutes les Facultez. Jusques à la nouvelle police qui fut introduite par le Cardinal de Toute-ville Legat en France. Car il permit par privilege special, aux Docteurs en Medecine, de pouvoir être mariez. Les Docteurs en decret presenterent leur requeste à l' Université le 9. Decembre, 1534. a fin d' avoir pareil privilege, dont ils furent deboutez: Sauf à eux de se pourvoir en la Cour de Parlement pour en être par elle ordonné ainsi que bon luy sembleroit: Et toutesfois absolument arresté pour la Faculté, tant des arts, que de Theologie, que, Vxorati à Doctoratu, & Regentia arcendi erant. Depuis le Parlement permit le Mariage aux Docteurs de decret, & le premier de cest ordre, que nous veimes marié, fut la Riviere vers l' an 1552. depuis pourveu de l' Estat de Lieutenant de Chasteleraud.

Tout cela a esté par moy discouru en passant pour monstrer que le premier fondement de l' Université a esté l' Eglise de Paris: J' adjousteray que celuy qui en jetta la premiere pierre, fut Pierre Lombard Evesque de Paris, en commemoration dequoy l' Université luy fait tous les ans un anniversaire en l' Eglise S. Marcel où ses os reposent: C' est luy qui composa ce beau livre des Sentences (fondement de la Theologie scholastique) tant celebré par ses survivans; Et sur lequel la Faculté de Theologie de Paris establit en partie, sa *profession. Il eut pour contemporain Pierre Comestor autheur de l' histoire Scholastique, qui fut enterré à S. Victor: & aussi un Galterus insigne Poëte, qui escrivit en vers Latins, la vie d' Alexandre, sous le tiltre d' Alexandreïde, grand imitateur de Lucain. C' est luy dans les œuvres duquel, nous trouvons un vers souvent par nous allegué, sans que plusieurs sçachent qui en fut l' Autheur.

Decidit in Scyllam, cupiens vitare Charibdim. 

Ce grand Evesque commença de florir vers la fin du regne de Louys VII. & s' accreut en reputation sous celuy de Philippe son fils, qui pour la grandeur de ses merites emporta par la voix des doctes, le surnom d' Auguste: & par une rencontre mutuelle de l' un à l' autre donnerent plus grande vogue aux bonnes lettres qu' auparavant. De maniere que dés & depuis ce temps là, l' Université qui avoit receu par le menu sa polisseure, se trouva toute formee. Quoy que soit vous en voyez frequente mention dont au precedant on n' avoit parlé. Et trouverez un jugement du mesme Auguste de l' an 1200, donné à *Berizy, contre des particuliers qui avoient tué quelques escoliers de Paris: Et par ce mesme Arrest il defend au Prevost de Paris de prendre jurisdiction & cognoissance de leurs forfaits, luy enjoignant de les renvoyer à leur juge en Cour d' Eglise. Sauf à decider puis apres, si le cas estoit de telle qualité que la cognoissance en deust appartenir au juge Royal. Et à la suitte de cestuy nous trouvons qu' en l' an 1215. le Cardinal de S. Estienne, Legat en France defendit à tout homme, de monter en chaize pour prescher, qu' il n' eust attaint l' âge de vingt cinq ans: & que nul ne peust lire en Theologie, qu' il ne fust âgé de trente cinq ans, & estudié par huit ans en ceste Faculté.

Et ayans les bonnes lettres trouvé lieu dedans Paris, sous le nom d' Université, elle fut apres esparse par toute la ville, & non au recoin que l' on luy assigne maintenant. En tesmoignage dequoy voyons nous encore le College des Bons enfans en la ruë S. Honoré pres du Louvre, l' Eglise de S. Germain de l' Auxerrois, que l' on appelle l' Escolle, & celle de saincte Catherine, que l' on surnomme du Val des Escoliers, nous servir de belles remarques, & mesmes en tous les Monasteres de la ville, où le Recteur fait sa procession, il ne la fait sinon de tant que ce sont lieux qui sont du corps de l' Université de Paris: vray que depuis que Jeanne Royne de Navarre, femme de Philippes le Bel eust construit le College de Navarre vers le haut de la montagne de Paris, en l' an 1304. ceux qui apres s' adonnerent à mesme sujet, comme il y en eut une infinité vers le regne de Charles VI. lors que l' Université estoit en grande vogue, ils choisirent tous ce mesme quartier, pour y être l' air vray semblablement plus sain, qu' en la fondriere, qui est accompagnee des esgouts de la ville. Chose qui a depuis apporté entre nous la difference que nous mettons entre la Ville, Cité, & Université: Aussi que dés son premier establissement elle faisoit ses congregations au College des Bernardins, que l' on a depuis reduites aux Mathurins pour la commodité du lieu. Un Robert de Sorbonne sous S. Louys est fondateur du College qui porte son nom, destiné pour les Theologiens, & croy que vous n' en trouverez point un plus ancien que cestuy-là. Grande chose: Qu' un simple valet de chambre de Roy ait apris aux Roys, Princes, Prelats, & grands Seigneurs une si noble Architecture. Vers ce mesme temps Guillaume de sainct Amour Theologien fut condamné par ses compagnons de la proposition par luy prise contre les quatre Ordres des Mendians.

Depuis les Roys à l' envy semblerent luy vouloir diversement gratifier: parce que Philippes le Bel par Edict de l' an 1295. ordonna que quelque emprunt qu' il fit pour la necessité des guerres, il n' entendoit que l' Université fust comprise en ce mandement, en l' an 1299. que pour une debte reelle, on ne pourroit gager un Escolier en ses meubles: Et en l' an 1311. que le Chevalier du Guet, dés son advenement jureroit de garder en tout & par tout les privileges de l' Université. Et Louys Hutin son fils, qui regna seulement un an, Que tous Escoliers peussent transporter leurs besongnes en tous endroits, où ils voudroient, sans trouble, ou inquietation d' aucun. Mais sur tous, grand fut le privilege que Philipes de Valois leur dona l' an 1340. par lequel il les exempta de tous peages, tailles, impositions, coustumes, ou autres telles charges personnelles, & qu' en tous leurs procés ils ne peussent être evocquez de la ville de Paris, a fin qu' ils ne fussent distraicts de leurs estudes: Et à ceste fin, pour conservation de leurs privileges, leur fut baillé pour Juge le Prevost de Paris, lequel pour ceste cause fut appellé Conservateur des privileges Royaux de l' Université de Paris. Et trouve-l'on aux vieux registres de l' Université, le formulaire du serment que le Prevost de Paris estoit tenu de faire sur son advenement és mains du Recteur de l' Université, pour conservation de ses privileges. Et depuis elle creut grandement en authorité, tant par le schisme de trente huict ans, qui regna en l' Eglise depuis le trespas de Gregoire unziesme, jusques à Martin cinquiesme, que par les troubles & divisions qui furent en France, entre les maisons d' Orleans, & de Bourgongne. Pour le premier, faisant vrayement ce qu' elle devoit, & au second, abusant de l' authorité, qui luy estoit sous main baillee par les chefs de part. Il n' y eut du commencement lors ordre en ceste France qui rabatit tant les coups du Pape de la Lune, qui fut Benoist XIII. comme ceste Université. Et Jean Duc de Bourgongne voyant l' authorité qu' elle avoit par ce moyen gagnee parmy le peuple, dressant une partie contre Louys Duc d' Orleans, la voulut sagement preoccuper encontre son ennemy. Qui fut cause que Louys dés l' an 1402. depescha Gentil-homme vers elle, pour la prier de vouloir bien & diligemment examiner ceste affaire, avant que de luy donner le blasme. Et voyant qu' elle prestoit l' aureille sourde à son ambassade, il se retira puis apres pour quelque temps (dit Alain Chartier en la vie de Charles septiesme) vers le Pape de la Lune, pour se liguer avec luy encontre l' Université, avec laquelle ce Pape faisoit profession expresse d' inimitié. Et creut en telle grandeur, que les gens de Messire Charles de Sanoisy grand Chambellan de France, & l' un des plus favoris du Roy, s' estans temerairement attachez à quelques escoliers, en une procession que l' Université faisoit en l' Eglise saincte Catherine du Val des Escoliers, & en y ayans blessé quelques uns, par Arrest du Roy, des Princes de son sang, & de son grand Conseil, donné en l' an 1404. il fut dit que sa maison seroit demolie, & Sanoisy tenu de fonder une Chapelle en faveur de l' Université, de cent liures de rente, & en mil cinq cens liures envers les blessez, & mil liures envers l' Université. Monstrelet adjouste que Sanoisy seroit banny & exterminé de la Cour du Roy, & tous ceux qui luy appartenoient de parentelle, & avec ce, privé de tous Offices Royaux. Ce qui fut executé, & ceste maison demolie, depuis reédifiee du consentement de l' Université, qui est aujourd'huy celle que l' on appelle l' hostel de Lorraine: Toutesfois ce fut à la charge qu' il y avroit un tableau attaché contre la paroy, au devant de l' Eglise saincte Catherine, dans lequel seroit contenuë toute l' Histoire & jugement, que l' on y peut encores aujourd'huy voir. Et fut pareillement desappoincté Sanoisy quelques mois de ses estats, pour contenter l' Université, mais puis apres restably.

Quelques annees apres, je veux dire en l' an 1407. Messire Guillaume de Tignon-ville Prevost de Paris fist pendre deux Escoliers, estudians en l' Université de Paris, l' un nommé Leger du Moussel Normant, & l' autre Olivier Bourgeois Breton, tous deux malgisans, qui avoient tué un homme de sens froid, lesquels ayans demandé leur renvoy, comme Escoliers, pardevant leur Juge, Tignon-ville sans y avoir esgard, les condamna d' être pendus, & estranglez au gibet de Montfaucon, où il les fit conduire dés l' instant mesmes, à jour failly, avec la lumiere des torches. Craignant que s' il remettoit du jour au lendemain ceste execution, ils ne fussent recoux du Roy, en faveur de l' Université. Chose dont elle appella, & en fit l' espace de quatre mois telle instance, qu' il fut ordonné par Arrest de l' an 1408. qu' ils seroient dependus, comme il fut fait. Et dit Alain Chartier que le Prevost y fust en personne, & les baisa en la bouche, & convoya avecq' ses sergens, depuis le gibet jusques au Monstier, où ils furent inhumez, estants leurs corps emmenez dans une biere, sur une charrette, & estoit le bourreau sur le cheval, vestu d' un surplis, comme un Prestre. Monstrelet adjouste, que pour garder les privileges de l' Université, il fut dit que les corps seroient rendus à l' Evesque: & au Recteur, comme il fut fait au Parvis de nostre Dame, & de là, ensevelis au Cloüestre des Mathurins, où l' on voit encores la tumbe. Le mesme Monstrelet dit, que Tignon-ville en perdit son estat: mais Juvenal des Ursins Advocat du Roy, qui estoit mieux nourry aux affaires de la France que l' autre, comme celuy qui estoit de ce temps-là, dit en la vie de Charles sixiesme, que ce fut un pretexte exquis par Jean Duc de Bourgongne pour le chasser, de tant qu' il favorisoit aux Orleannois, pour faire mettre en son lieu Pierre des Essars, l' un de ses confidents. Jamais punition, hors la mort, ne fut plus griefve envers un Juge, qui n' avoit peché que pour un grand zele qu' il avoit eu de bien faire: Mais l' authorité de l' Université estoit lors montee en tel degré, qu' à quelque condition que ce fust, il l' a falloit contenter. Elle estoit tellement peuplee, que le mesme Juvenal des Ursins atteste qu' ayant fait une procession en l' an mil quatre cens & neuf, de l' Eglise de saincte Geneviefve, à celle de sainct Denis pour l' assopissement des Troubles, qui adoncques voguoient par la France, l' assemblee se trouva si grande, que le Recteur estoit encores devant les Mathurins, lors que ceux qui tenoient les premiers rangs, estoient en la ville de sainct Denis. Et adjouste Alain Chartier, apres avoir raconté l' Histoire de Tignon-ville ces deux ou trois lignes. La dicte Université avoit grande puissance pour ce temps-là. Tellement que quand ils mettoient la main à une besongne, il falloit qu' ils en vinssent à bout, & se vouloient mesler du gouvernement du Roy, & autres choses. Cest Autheur, qui fut l' un des premiers de son siecle, n' en parloit point comme un aveugle des couleurs, parce que cela se verifia depuis par effect en une infinité d' actions qui se presenterent. Car soudain apres l' assassinat commis en la personne du Duc Louys, Maistre Jean Petit, l' un des premiers Docteurs de la Faculté de Theologie, prit la cause du Duc Jean en main, & soustint le huictiesme Mars 1407. au milieu du Parvy nostre Dame de Paris, par plusieurs raisons sophistiques, que ce meurdre estoir advenu par juste jugement de Dieu. Et depuis ce mesme Duc s' estant emparé du Roy, & ayant donné ordre de faire eslongner de la Cour tous les autres Princes du sang, qui portoient le party le plus foible, s' allia du tout avecq' l' Université, & ayant persuadé au Roy que tous ces Princes avoient conspiré contre sa Majesté, & deliberé de creer un nouveau Roy à la France, Charles sixiesme en escrivit promptement à l' Université sa fille, la priant de faire prescher & publier ceste conjuration au peuple, & qu' elle voulut prendre la protection de sa cause: A laquelle semonce tous les Prescheurs aiguisans & leurs langues, & leurs esprits commencerent à crier encontre les Armignacs. Car ainsi furent-ils nommez du Connestable Armignac, l' un des plus forts, & puissans guerriers de la faction des Orleannois: Presches qui gagnerent avecq' tel avantage le cœur des Parisiens, que jamais ils ne se peurent reconcilier avec ces Princes, encores que leur querelle fust la plus juste, jusques à ce que toutes choses estans en desolation & ruine, ils s' apperceurent, mais à tard, de la faute qu' ils avoient faite, supportans le party du Duc Jean. 

Mais pour ne m' eslongner de mon but, & monstrer tousjours quel rang tenoit lors l' Université, l' on trouve que le 7. jour de Fevrier, l' an mil quatre cens treize, assistee du Prevost des Marchands & Eschevins de la ville de Paris, elle vint remonstrer à la Cour de Parlement, qu' auparavant les Finances du Roy avoient esté mal gouvernees, & qu' elle avoit deputé certains personnages notables, pour en faire remonstrances au Roy, supliant la Cour faire le semblable de son costé. A quoy la Cour de Parlement sagement luy fit response, que c' estoit à elle de faire justice à ceux qui la luy demendoient, & non de la requerir, & qu' elle feroit chose indigne de soy, si elle se rendoit partie requerante, veu qu' elle estoit Juge. Cela fut cause que l' Université ne prenant ceste response pour payement, voulut avoir sa retraicte vers son garend ordinaire, qui estoit le Duc de Bourgongne, à l' instigation duquel le Roy fit une assemblee, & convocation generale dedans la ville de Paris, sur la reformation des Estats, où se presenta Frere Eustache Pauilly Carme, Docteur en Theologie, portant la parole pour l' Université, avecq' telle vehemence qu' il passa sur tous les Estats, monstrant les abus qui y estoient, mesme exhiba un ample roolle, dont il estoit porteur, dans lequel estoient declarez par le menu les grands & excessifs gages de tous les Officiers de la France, & que la multiplication de tant d' Officiers qu' il y avoit ne tendoit qu' à la subversion de l' Estat.

Ceux qui lors avecq' plus de nez jugeoient des affaires, cognoissoient fort bien que jamais la France n' avoit nourry dans son sein un plus certain ennemy que le Bourguignon, pendant qu' il pretextoit ses actions du masque d' un Roy mal ordonné de son bon sens, lequel il avoit en sa possession. Le premier qui oza remedier à ce mal dedans la ville de Paris, fut Maistre Juvenal des Ursins Advocat du Roy, personnage qui de son temps fit une infinité de bons offices au public, tant aux armes, comme en la justice. Cestuy, apres avoir longuement couvé un creue-cœur dedans soy, voyant le commun peuple attedié des grandes tyrannies, & extorsions, qui se faisoient dans la ville par les Bouchers, & Cabochiens, sous l' authorité du Duc Jean, qui lors estoit pres du Roy au bois de Vincennes, delibere d' en venir à chef. Et pour y parvenir, encores est-il contrainct d' avoir recours à l' Université. Pour le faire court, avecq' l' aide d' elle, il y besongne de telle façon, qu' il separe le Roy d' avecq' le Duc de Bourgongne, & fait dissiper, & esvanoüir à un clin d' œil tous ces mauvais garnimens, qui tenoient la ville sous leurs pieds, donne ordre que les prisons soient ouvertes à des plus grands Seigneurs de la France qui estoient dans la Bastide, destinez d' être defaits quelques jours prochains. Et tout d' une suitte fait approcher du Roy tous ces pauvres Princes qui avoient esté bannis de sa presence, les uns pour poursuivre une juste vengeance de la cruelle mort qui estoit advenuë à leur pere, les autres pour prester l' espaule à une querelle si bonne que celle-là. Et comme il n' y a riens qui soit plus doux au cœur de l' homme que se ressentir d' un tort qu' il a souffert, aussi soudain apres le retour de ceux-cy, ce fut seulement de joüer à beau jeu beau retour, & user de mesme pretexte que l' autre, pour combattre leur ennemy, c' estoit la presence du Roy. Et neantmoins encores pour y fraper coup, fallut-il interposer l' authorité de l' Université. J' ay leu unes lettres patentes qui furent lors depeschees sous le nom de Charles VI. par lesquelles il advertissoit de tous les costez ses principaux Officiers de la deliberation qu' il avoit prise en son Conseil de faire la guerre au Duc Jean, au bas desquelles estoit escrit, A la relation de son grand Conseil tenu du commandement de la Royne, & de Monseigneur le Duc de Guyene, auquel le Roy de Sicile, Messieurs les Ducs d' Orleans, & de Berry, Louys Duc de Bavieres, les Comtes de Vertus, & de Richemont, de Vendosme, & plusieurs du grand Conseil, & du Parlement, le Recteur, & plusieurs de l' Université estoient. Qui monstre que l' on les appelloit quelquefois au conseil des affaires d' Estat: & depuis comme le naturel du François est de s' attacher aux extremitez, le Parisien recevant pareil traictement des Armignacs, comme il avoit fait des Bourguignons, encores voulut-il reprendre ses anciennes brisees, & introduisit de nuict l' lsle-Adam, qui fit tels ravages, comme l' Histoire de ce temps-là en est chargee. 

Or comme ainsi soit que toute personne qui se donne plus de puissance, se donne par mesme moyen fort aisément plus de volonté qu' il ne doit, & qu' en nos actions il soit fort aisé de glisser d' une liberté (encores qu' elle soit honneste du commencement) en une licence effrenee: aussi ceste Université passant plus outre, se mit en fin à l' essor: d' autant qu' irritee des indignitez qu' elle enduroit des Ordinaires, elle appella de l' ordonnance de l' an 1417. faite en faveur d' eux: mais elle trouva icy un obstacle par l' authorité de la Cour de Parlement qui fit arrester le Recteur en la maison d' un chantre de la saincte Chapelle, & constituer prisonniers en la Conciergerie ceux qui tenoient rang plus bas. Ce qui rendit de là en avant l' Université quelque peu plus retenuë, non toutesfois de telle maniere qu' encores elle ne s' en voulut ressentir, mesmement contre le Parlement: mais en fin trouva qu' elle avoit trop forte partie à combatre. Parce qu' en la mesme annee ayant obtenu du Roy des privileges trop advantageux, & les voulant faire verifier, la Cour de Parlement ne le voulut faire. D' autant qu' il y avoit quelques clauses pour esmouvoir à sedition, & manda querir aucuns des chefs, & principaux de l' Université, pour le leur remonstrer: mais ils ne se voulurent contenter de ces remonstrances, & persisterent à leur requeste. Disans que si on ne les publioit, ils cesseroient leurs leçons. Nonobstant ce, ils n' obtindrent à leur intention, s' estant mesmement le corps de la ville de Paris opposé à ceste verification, & presenté requeste, a fin d' être receu partie: sur laquelle il avroit esté ordonné que les parties viendroient plaider au premier jour. Quoy voyant l' Université, & que ses affaires ne reüscissoient selon son desir, tourna sa pensee à nouveau conseil. Soustenant qu' elle ne devoit plaider en la Cour, & qu' elle avoit ses causes commises pardevant le Prevost de Paris, Conservateur de ses privileges. A l' instant mesmes le Prevost la vendique, & demande le renvoy pardevant soy, pour luy faire puis apres droict sur ses privileges. Cecy estoit du 25. Juin 1417. Pareille requeste le 4. Juillet, autre le 13. ensuyvant, a fin qu' on leur rendist leurs privileges. La Cour craignant quelque esmeute (car ce fut l' an que l' Isle-Adam estoit entré dans Paris) ne voulut interposer expressement son authorité sur ce renvoy: mais tirant prudemment les choses en longueur, en fin avecq' la colere, s' esvanoüit aussi la requeste en fumee, & se presentant nouveau succés d' affaires en la France par le meurdre du Duc Jean en la ville de Montereau, aussi prit-on nouveaux desseins: & neantmoins fut ceste querelle de l' Université totalement assopie par l' Edict du Roy Charles VII. verifiee le deuxiesme May, 1446. par lequel fut ordonné que la Cour cognoistroit des causes d' icelle, quand le cas y escherroit.

Les Anglois s' estans en l' an 1420. impatronisez de l' Estat, par le mariage qui fut fait avec Catherine de France, je ne voy plus que l' authorité de l' Université soit telle, comme elle estoit auparavant en telles affaires. Bien luy communiqua l' on de tous les principaux actes du procés que l' on faisoit à Jeanne la Pucelle, dedans la ville de Roüen. C' estoit parce que les Anglois pretendoient que Jeanne pour avoir pris l' habit d' homme, estoit heretique, & qu' il estoit question du fait de la Religion, dont on a tousjours estimé en France qu' il en falloit avoir l' advis de l' Université, depuis qu' elle fut establie: Finalement tous ces anciens troubles estans avecq' le temps assopis, & les Anglois chassez du Royaume, par la vaillance des grands Capitaines de Charles VII. tout ainsi que dedans ces dissensions estoit nee, aussi avec leur mort s' estaignit ceste grandeur plus oiseuse, que profitable à ceste Université, estant par ce moyen reduite en son premier ordre, & se contenant dedans ses anciennes bornes. Elle fut reformee en l' an 1452. par le Cardinal de Toute-ville Legat en France. Et certes qui voudra repasser par toute les Universitez de l' Europe, il n' en trouvera une seule qui revienne au parangon de ceste-cy, de laquelle nous pouvons dire que tout ainsi que du cheval de Troye sortirent innumerables Princes, & braves guerriers, aussi nous a-elle produit une infinité de grands personnages, dont la posterité bruira tant que le monde sera monde. En la Theologie, un Gerson, un Clamengis. Car je ne veux faire mention de Pierre Lombard pere de tous, qui est sans pair: en la faculté de Decret, un Rebufy, un Quentin, en la Medecine, un Sylvius, un Fernel, un Tagault, un Gonteric: en la Philosophie, & en toutes bonnes lettres, un Guillaume Budé, auquel, outre l' accomplissement qu' il eut de toutes les disciplines, on doit l' institution des Lecteurs (que nous appellons Professeurs du Roy) sous le Roy François premier, comme celuy qui luy en donna les premiers memoires, un Jean Faber, un Adrian Turnebus, un Pierre Ramus, un Robert Estienne. Es Mathematiques, un Oronce, En la langue Grecque, le mesme Budé, & un Tusan: en l' Hebraïque, un Vatable, & ce non comparable Mercerus, a fin que je ne parle des vivans, dont ceux qui viendront apres nous, pourront parler sans envie. Car quant à l' œconomie de ceste Université, concernant la distribution de ses dignitez, & autres menuës parcelles: on les pourra plus amplement entendre par mon Plaidoyé encontre les Jesuites. 

mardi 8 août 2023

9. 8. Paris, Université, Philippes Auguste

Que ce n' est pas un petit honneur à la ville de Paris, d' avoir esté premierement nommee Université souz le regne de Philippes Auguste.

CHAPITRE VIII.

Quand je vous ay recité ce que dessus, je ne pense pas faire moins d' honneur à nostre Université de Paris, que ceux qui attribuent son origine à l' Empereur Charlemagne. Nous avons trois familles de nos Roys qui produisirent trois grands Roys sur tous les autres. La premiere le grand Clovis; la seconde l' Empereur Charlemagne, & la troisiesme, Philippes second surnommé Auguste, qui eut plusieurs belles correspondances avecques Clovis. Ils furent tous deux faits Roys en l' aage de quinze ans, & deslors par un taisible instinct de leurs natures se trouverent disposez à plusieurs grands exploits de guerre. Clovis combatit l' heresie Arrienne qui lors estoit en vogue par la Gaule, depuis appellee France: Et Philippes l' heresie Albigeoise, qui en avoit de son temps infecté une bonne partie. Clovis rendit les Roys Bourguignons à soy tributaires, Philippes reduisit au baise-main Eudes Duc de Bourgongne, s' estant contre luy revolté, Clovis en la journee de Tolbiac, obtint contre les Allemans une victoire espouventable, dont long temps apres ils ne se peurent relever: Et l' autre en un mesme jour en obtint deux, l' une à Bouines contre Othon Empereur d' Allemagne, Ferrand Comte de Flandres, Hugues Comte de Boulongne conducteur des sujets rebelles. 

L' autre à la Roche-dumaine, par Louys fils de Philippes contre Jean Roy d' Angleterre, avec une telle cheute qu' il ne s' en peut relever, quelque masque que depuis il voulust emprunter de l' authorité du Sainct Siege, quand il se mit sous son vasselage. Et qui est une chose grandement remarquable, c' est qu' en la bataille de Bouines, il y avoit trois soldats ennemis contre un des nostres. Et pour finir ce discours par où je l' ay commencé, je veux dire par la Religion: tout ainsi que Clovis, auparavant que d' estre Chrestien, ayant entendu que Sainct Denis estoit l' Apostre titulaire des Gaules, eut son recours vers luy en la journee de Tolbiac, se voyant pressé par son ennemy en ces mots (Sainct Denis mon joye) pour ma joye, par une parole de Prince qui n' estoit pas bonnement nourry en nostre vulgaire, voulant dire que s' il pouvoit estre garanty du peril qui l' assiegeoit, il se feroit de là en avant Chrestien. Parole qui servit depuis longuement à nos Roys de mot de Guet en leurs affaires militaires. Aussi le Roy Philippes d' une non moins forte devotion, jamais n' entreprit guerre, qu' il ne se presentast avecques tres-humbles prieres à Dieu dedans l' Eglise de Sainct Denis, & apres la Messe dite, ne prit par les mains de l' Abbé son estendard, que depuis nous appellasmes Auriflambe, qui servit par plusieurs siecles à nos Roys, pour leur estre comme une estoile qui les conduisoit en toutes les entreprises qu' ils faisoient contre leurs ennemis. Quand je vous fais cette comparaison du Roy Philippes, avecques le Roy Clovis, je ne pense faire peu de chose pour luy: Car je n' estime qu' il y ait eu jamais en France, un si grand Roy que Clovis, & n' en excepte pas Charlemagne, quelque grandeur que l' ancienneté luy ait voulu attribuer.

Mais encore veux-je passer plus outre. Le Roy Philippes dont je parle, fut deslors de sa naissance, appellé par la voix commune du peuple, Dieu-donné. D' autant que le Roy Louys son pere n' avoit eu de ses deux premieres femmes que des filles, & de sa troisiesme sur son vieux aage Dieu luy envoya ce Prince masle, pour luy succeder à sa Couronne: Et depuis pour les grandes conquestes qu' il fit, fut par sa posterité surnommé le Conquerant, & encore dés son vivant appellé par les siens Auguste, sur le moule d' Auguste premier Empereur de Rome: Et veritablement non sans cause, pour les familieres rencontres qui se trouverent entre ces deux Princes. Ils regnerent tous deux quarante & trois ans: Tous deux prindrent plaisir d' embellir de plusieurs ouvrages signalez, le premier la ville de Rome, le second celle de Paris, toutes deux villes capitales de leurs Empire & Royaume. L' Empereur Auguste bastit le Temple de Mars le Vainqueur, celuy d' Apollon au Palais, & de Jupiter foudroyant au Capitole: Nostre Roy Philippes Auguste fit paver toute nostre ville de Paris, auparavant comblee de fanges, clorre de murailles tout le quartier, qui deslors prit le nom d' Université, comme pareillement le grand Cimetiere de Sainct Innocent, fonda l' Abbaïe de Nonnains joignant Paris, souz le nom de Sainct Antoine des Champs, environna de murailles le Bois de Vincennes, distant de Paris d' une lieuë, qu' il peupla de plusieurs bestes sauvages pour servir de plaisir à luy, & à ses successeurs. L' Empereur Auguste divisa la ville de Rome en divers quartiers. Nostre Roy Auguste ordonna la police del' Eschevinage dedans Paris, & en outre y establit les Hales, magasin pour y debiter toutes sortes de marchandises. L' autre conquit la Cantabrie, Aquitaine, Pannonie, Dalmatie, Illirie. Nostre Philippes le Vermandois, la Normandie, Guyenne, Poictou, Anjou, le Maine, Touraine. D' une chose furent-ils en cecy difformes. Car celuy-là se fit grand par l' induë usurpation de sa Republique sur les siens. Au contraire cestuy-cy s' agrandit des despoüilles de ceux qui s' estoient induëment enrichis des nostres. Parce que toutes les Provinces par luy conquises, estoient de l' ancien estoc de nostre Couronne. Tellement que ce ne fut point tant conqueste, que reünion à sa premiere nature.

Le corps d' Auguste fut apres son decez porté sur les espaules des Senateurs, au lieu où il devoit estre bruslé, suivant l' ancien Paganisme, & ses cendres recueillies par les premiers de l' Ordre de Chevalerie, nuds pieds, pour estre d' une main mises en un magnifique cercueil; faveur qui ne fut jamais depuis faicte à aucun de ses successeurs. Aux obseques de nostre Philippes Auguste se trouverent l' Evesque de Portueuse Legat du Sainct Siege, deux Archevesques de Reims, & Sens, & vingt Evesques, sans y comprendre la fleur de la Noblesse de France, & avecques cette devote, & noble procession il fut inhumé en l' Eglise de sainct Denys, ancien & ordinaire tombeau de nos Roys. Honneur qui ne s' est jamais trouvé aux funerailles d' aucuns d' eux, ny devant ny apres luy. Honneur toutesfois à luy procuré, non par une vaine ambition mondaine reparée du manteau de devotion, ains par mystere caché de Dieu. Car lors le Roy deliberant d' aller guerroyer les heretiques Albigeois à toute outrance, s' estoit faite cette grande assemblee dedans Paris, sous l' authorité du Pape, pour sçavoir quel ordre on devoit tenir au deffroy de cette guerre. Et adoncques il pleut à Dieu de l' appeller à soy, voulant que la fin & catastrophe de sa vie fust couronnée d' une si belle assemblée, tant de Prelats, que Princes, Barons, & braves Chevaliers. Et pour me retrouver à mon but, ainsi que sous l' Empereur Auguste, la Poësie fut en plus grand credit qu' elle n' avoit esté auparavant dedans Rome, aussi advint il le semblable à nostre France sous Philippes Auguste. Car lors nous eusmes Guillaume de Lorry, & Helinan Poëtes François, & uns Leoninus Galterus, & Gulielmus Brito, qui en vers heroïques Latins meirent les mains à la plume. Le premier en la version d' une grande partie de la Bible, le second en la vie du Roy Alexandre sous le titre d' Alexandreide, & le dernier en celle de nostre Philippes son Maistre sous le nom de Philippide. Bien recognoistray-je qu' en ce subject Auguste emporta un grand advantage sur nostre Philippes. Mais il s' en sçeut fort bien revanger. Car sous luy fut plantee dedans Paris, l' Université des bonnes lettres, & sciences: Ce qui n' estoit advenu à Auguste dedans Rome.

Mais à quel propos tout cecy? Pour vous dire que si Charlemagne, fut à bonne raison surnommé le grand, dont nous avons forgé en nostre vulgaire celuy de Charlemagne, par une corruption de langage, Philippes second ne fut pas à moindre, des uns surnommé Auguste, des autres le conquerant, & de tous Dieu-donné. Et ceux qui attribuent l' origine de l' Université à Charles s' abusent, tout ainsi qu' en celle des douze Pairs, qui ne sont pas deux petits ordres en nostre France: Et neantmoins la verité est, que tout ainsi que l' Université prit son origine, puis croissant de la façon que dessus, & sous Philippes commença d' estre dite Université: Ainsi fit elle le semblable au fait des Pairs: car cest ordre ayant pris sa source & progrés, comme j' ay deduit par mon second livre, en fin le premier sacre de nos Roys, auquel est faite mention des Pairs qui s' y trouve, fut en celuy de Philippes Auguste. Tellement qu' il faut attribuer la verité de ces deux grandes polices bien & deuëment formées à Philippes, & le commun bruit au Roy Charles.

lundi 26 juin 2023

4. 8. Des Ordonnances de Charlemagne, pour obvier aux fraudes que l' on pratiquoit en France sous le pretexte des Clericatures.

Des Ordonnances de Charlemagne, pour obvier aux fraudes que l' on pratiquoit en France sous le pretexte des Clericatures.

CHAPITRE VIII.

Le Chapitre precedent m' a remis en memoire quelques fraudes que l' on pratiquoit anciennement en la France, sous le pretexte des Clericatures, ausquelles il fut pourveu par nostre Empereur Charlemagne, tout ainsi que Philippes le Bel voulut s' opposer à celles que l' on avoit introduict en France, sous le masque des Bourgeoisies du Roy: Mais parce que ce discours prend ses racines de plus haut, il convient noter que les anciens Romains, au moins sur le moyen aage de leur Jurisprudence, furent fort empeschez de resoudre si celuy qui avoit obtenu plaine franchise & liberté de son Maistre, devoit estre tout d' une main reputé Citoyen de Rome, qui estoit une liberté outrepassant toutes les autres. Le premier qui franchit le pas fut l' Empereur Constantin, lequel par un privilege special de nostre Religion Chrestienne, voulut que celuy qui estoit affranchy au sein de nostre Eglise, ioüyst de cette plaine liberté, qui n' avoit jamais auparavant esté communiquee à quelque personne que ce fust: Et comme ainsi soit que tous les mauvais exemples prennent leur source de beaux & specieux commencemens, aussi advint-il le semblable en cet affaire. Car au commencement cette liberté se donnoit du consentement du Maistre, avec l' intervention de l' Eglise pour l' authoriser d' avantage: Toutesfois par succession de temps les Ecclesiastics s' en voulurent faire accroire, & le serf estant manumis par eux obtenoit plaine liberté malgré son Maistre. Dont les Maistres irritez en faisoient leurs plaintes aux Eglises: A quoy on se trouva bien empesché. Car estant cette difficulté proposee en un Concil de Carthage, sçavoir si les serfs qui avoient recours aux Eglises, pouvoient estre affranchis sans attendre le vouloir de leurs Seigneurs, & si apres cette manumission leurs Maistres les pouvoient r'appeller à leur ancienne servitude, il n' en fut rien resolu, ains par les 67. & 85. articles fut cette difficulté remise à la volonté, & decision de l' Empereur: ce qui causoit l' obscurité estoit que les choses mises en balance d' un costé, de donner par une Eglise liberté à un esclave, sous pretexte des Ordres sacrez, c' estoit priver un Maistre, sans son consentement, de ce qui luy appartenoit. Au contraire, de le reduire en son ancienne servitude, c' estoit troubler la dignité Ecclesiastique. Depuis nostre Charlemagne y voulut apporter police. Car par le vingt & troisiesme article du premier Livre de ses Loix, il deffendit par expres de n' appeller à l' Ordre Clerical ou Monachal un homme sans le vouloir & consentement de son Maistre. Et par l' article 82. il ordonna que nul Evesque ne *promeust aux Ordres de Prestrise un serf, que premierement il n' eust esté affranchy par son Maistre. Le texte du 23. article est tel: Ut servuum alterius nullus suscipiat ad Clericalem ordinem, & en l' article 82. Statuimus ut nullus Episcoporum servos ad sacros ordines promouere poßit, nisi prius à Domino libertatem consequuti sint. Et si l' Evesque avoit contrevenu à cette Ordonnance, il estoit par le mesme article permis au maistre un an apres la consecration, de reduire son serf à sa premiere qualité, sinon que luy le sçachant, n' y eust voulu du commencement apporter obstacle. Car en ce cas il estoit estimé y avoir preste taisible consentement, & par consequent non receuable à s' en plaindre. Ce mesme Empereur voulut encores passer plus outre. Car tout ainsi qu' il deffendit que le serf peust estre receu aux Ordres qu' il n' eust permission de son Maistre, aussi ne voulut-il que celuy qui estoit né de condition franche peust entrer en ce mesme Ordre Clerical, sans avoir congé de luy. Et parce que cela importe à l' Estat, il merite bien que nous inserions icy l' article tout de son long, qui est le 113. du I. Livre. 

De liberis hominibus, qui ad servitium Dei se tradere volunt, ut prius hoc non faciant, quam à nobis licentiam postulent: hoc ideo quia audivimus aliquos ex illis non tam caussa devotionis fecisse, quam pro exercitu, seu alia functione fugienda: quosdam verò cupiditatis caussa ab his, qui res illorum concupiscunt circumventos audivimus, & hic ideo prohibemus.

Qui est à dire: Nous deffendons à toutes personnes de franche condition de se faire d' Eglise, s' ils n' en ont eu congé de nous, & ce d' autant que nous avons entendu que quelques-uns d' entr'eux l' ont fait, non tant par devotion, que pour s' exempter de l' armee & autres charges Royales, mesmes qu' il y en a les aucuns d' eux, lesquels surpris par l' avarice de ceux qui affectionnoient leur bien y sont entrez, & c' est pourquoy nous le deffendons. Maurice Empereur de Constantinople en avoit fait une non grandement esloignee de cette-cy. Car il deffendit à tout homme appellé en charge publique de ne se faire promouvoir aux dignitez de l' Eglise. Davantage que celuy qui estoit enroollé en sa gendarmerie ne se peust faire Moine, s' il n' avoit accomply le temps entier de sa Milice, ou que pour estre valetudinaire & maladif, il eust eu permission de se retirer en sa maison. Chose qui donna sujet à S. Germain au I. Livre de ses Epistres, de luy mander que pour le regard du I. article, il ne le pouvoit assez loüer. Parce que celuy qui vouloit au lieu de sa dignité seculiere entrer en une Ecclesiastique, n' abandonnoit pas le monde, ains le changeoit. Mais quant au 2. il ne le pouvoit approuver. D' autant que par la vie solitaire, un Moine renonçoit à toute mondanité, pour viure au repos de sa conscience. En quoy s' il m' estoit permis d' interposer mon jugement, je dirois volontiers que l' un & l' autre avoit quelque raison sous divers regards: S. Gregoire parlant pour ceux qui sans arriere-boutique se voüoient à Dieu: & l' Empereur Maurice voulant s' opposer à ceux qui sous le masque d' un froc, vouloient se descharger du faix de la guerre.

vendredi 4 août 2023

8. 10. Du Proverbe, Faire la barbe à quelqu'un.

Du Proverbe, Faire (bien) la barbe à quelqu'un.  

CHAPITRE X.

Nous usons de ce Proverbe quand nous voulons dire que nous avons bravé quelqu'un. Proverbe qui eust esté ridicule lors que nous portions barbes razes, tout ainsi que maintenant celuy dont j' ay discouru au precedant chapitre: Toutesfois il ne faut point faire de doute qu' autresfois cela se tournoit en une bien grande injure. Dedans les anciennes loix d' Allemagne, au tiltre 66. il estoit deffendu de tondre un homme libre, ou luy raire sa barbe, contre sa volonté, sous les peines qui y sont portees. Nous lisons dedans nos Annales, que Dagobert jeune Prince se voulant venger d' un sien Gouverneur, luy fit raire sa barbe, pour un despit qu' il avoit conceu contre luy: Chose qui se descouvre avoir esté en usage par un autre exemple autant & plus exprés que cestuy-là, en un vieux Roman intitulé La jeunesse d' Ogier le Danois, où parlant des Ambassadeurs que Charlemagne avoit envoyez en Dannemarc, vers Geofroy pere d' Ogier, pour recevoir le tribut qui estoit deu à l' Empereur, & deduisant l' indignité dont la femme de Geofroy avoit usé envers eux.

Advise soy de grand diversité

De mes Charlons n' anessum honoré, 

Chacun fait raire sa barbe outre son gré,

Pource que Charles qui tant a de fierté, 

Ait si son cuer de despit allumé, 

Quand li Mes Charles furent à ce mené, 

Qu' ils se veirent ainsi defiguré, 

Bien pouvez croire que ce leur a grevé.

Et les Ambassadeurs de retour vers Charlemagne, luy dirent.

En voz despit feumes si mal tenus, 

Que sans noz barbes sommes cy revenus.

Et de là faict un discours que Charlemagne vouloit entreprendre contre Geofroy une forte guerre. Qui nous est une leçon, soit que ce compte soit vray ou non, que pour le moins l' autheur du Roman estimoit estre grande injure, de faire la barbe à quelqu'un contre sa volonté, & paravanture de cela est procedé que par un commun Proverbe nous disons, Faire la barbe à quelqu'un, quand on l' a bravé de parole, ou d' effect.

mardi 15 août 2023

10. 20. Dont procederent les calomnieuses accusations contre la Royne Brunehaud, & qui fut la vraye cause de la cruauté exercee contre elle.

Dont procederent les calomnieuses accusations contre la Royne Brunehaud, & qui fut la vraye cause de la cruauté exercee contre elle.

CHAPITRE XX.

Nous avons deux Roys ausquels l' ancienneté donna le titre de Grand: Sous la premiere lignee, Clotaire second, (car ainsi est il honoré par le Greffier du Tillet) & sous la seconde Charles premier de ce nom, depuis appellé Charlemagne. Et tout ainsi que pour exalter les faits heroïques de Charles se trouverent plusieurs gaste-papiers, les uns qui par leurs Romans, les autres qui sous le nom d' Histoires, nous repeurent de plusieurs mensonges concernans l' Estat à l' avantage de ce Roy, comme de l' introduction des Pairs, des Parlemens, de l' Université de Paris, & autres particularitez, dont les vrays Autheurs de son temps, & ceux qui n' en furent esloignez n' ont parlé: Aussi les personnes Ecclesiastiques & Moines, qui sous la premiere lignee, & long temps apres s' estoient donné toute jurisdiction sur la plume en cette France, controuverent diverses fables pour couvrir la honte & pudeur de la furieuse cruauté, que Clotaire avoit exercee sur la Royne Brunehaud. Et comme par malheur chacun se plaist plus sur la mesdisance; aussi ceux qui depuis ont escrit, l' ont renvié les uns sur les autres. Toutesfois quelques uns plus retenus ont pretendu cette cruauté estre du tout fabuleuse, ne se pouvans faire accroire qu' elle eust peu se loger en une ame si debonnaire, comme estoit celle du Roy Clotaire. Chose dont il ne faut meilleur ny plus prompt tesmoignage que de Fredegaire le mesdisant, lequel apres avoir descouvert les cruautez barbaresques executees contre Brunehaud par le commandement expres de Clotaire, nous faict part tout soudain d' un traict de sa clemence admirable, que je ne die inimitable, qui fut tel.

Lendemon Evesque de Sion envoyé par Alethee Patrice de Provence, pour suborner la Royne Bertrude femme de Clotaire luy dit: que par le calcul exact qu' il avoit fait des Astres, il trouvoit que le Roy son mary devoit mourir dedans l' an, & que s' il luy plaisoit entendre au mariage d' elle, & Alethee, extraict de la race des Anciens Roys de Bourgongne, & enlever quant & soy tous les thresors, il estoit prest de l' espouser, & feroit mourir sa femme: Quoy faisant Alethee se promettoit d' arriver à la Royauté. Ce dont la Royne preude Princesse ayant donné advis au Roy, l' Evesque en ayant eu le vent se sauva de vistesse. Jamais crime de leze Majesté ne fut circonstancié de tant d' ordures, vilenies, & meschancetez que cestuy, un Prelat contrefaire le devin, mesme sur la mort du Roy son Seigneur, pour parvenir à sa malheureuse intention, de là devenir maquereau, pour non seulement suborner la pudicité d' une saincte Royne; ains pour mettre le divorce entre le Roy son mary & elle, brasser un autre mariage, fondé sur la mort future d' une autre femme; le tout sous une esperance de troubler l' Estat par nouveaux troubles & divisions. Toutesfois Clotaire par sa debonnaireté prit pour le regard de l' Evesque en payement, les humbles supplications & prieres à luy faites par un Abbé: Ordonnant pour toute peine qu' il feroit de là en avant faire residence actuelle en son Evesché, qui estoit luy imposer pour supplice, ce qui estoit du deub de sa charge. Et quant à Alethee il se contenta de sa teste, sans autres tortures de membres. Toutesfois ce fut toute autre leçon en la Royne Brunehaud: Aimoïn s' est bien donné garde de toucher cette corde d' Alethee, sçachant que cette clemence si proche desmentoit la cruauté precedante. Vray Dieu! dont pouvoit provenir cette contrarieté d' opinions en un mesme esprit, & presque en un mesme temps? car pour bien dire, il n' y eut pas moins de faute en la trop grande clemence, que ce Roy exerça contre le Patrice, & l' Evesque, qu' en la trop grande & excessive cruauté contre la Royne Brunehaud, je le vous diray en peu de paroles. Tout cecy est deu à la detestable garnison de Garnier Maire du Palais de Bourgongne.

L' an de la conqueste du Royaume d' Austrasie sur Theodebert à peine estoit expiré, que Theodoric le conquerant alla de vie à trespas l' annee fix cens dix-sept, delaissez quatre siens enfans naturels, Sigebert, Childebert, Corbe, & Meroüee, & la Royne Brunehaud son ayeule, ainsi que j' ay touché par l' autre Chapitre, & suis encore contrainct de le dire. Sigebert l' aisné aagé d' unze ans, Childebert de dix, Corbe de neuf, Meroüee de six, & Brunehaud de soixante & douze ans. En tous lesquels y avoit grande foiblesse d' aages, és Princes, pour le peu d' ans qui estoit en eux, & en la Princesse pour le trop. Et par consequent peu de ressource en eux tous, en cas de malheureux succez. C' est pourquoy les Austrasiens & Bourguignons commencerent de projetter un nouveau party. Qui fut de se soubmettre sous la puissance du Roy Clotaire, aagé lors de trente ans ou environ, lequel s' estoit grandement accommodé pendant les divisions des deux freres.

Les Austrasiens maniez par Arnoul & Pepin deux des principaux Seigneurs du pays, aucunement excusables, tant pour avoir veu la detestable cruauté que Theodoric avoit sur son advenement pratiquee contre son nepueu enfançon, fils du Roy Theodebert, que pour estre ses nouveaux subjects non encore duicts à luy obeïr, quand il fut prevenu de mort. Soubs quelles conditions ces deux Princes conducteurs de cette orne, entrerent en ce nouveau party, nos Histoires n' en parlent point. Mais quant aux Bourguignons qui avoient tousjours esté ses naturels & anciens subjects, ils ne s' en pouvoient excuser: estans mesmement à ce induits & conduits par les sourdes persuasions & menees de Garnier Maire du Palais, soubs la protection duquel la Royne Brunehaud s' estoit mise avecques ses quatre arriere-petits enfans; & soubs cette asseurance ayant faict proclamer en la ville de Mets, Sigebert l' aisné Roy de Bourgongne, & de Austrasie, elle le laissa és mains de Garnier pour le conduire & recognoistre Roy és villes de la nouvelle conqueste, qui estoient l' oree de la riviere du Rhin, dont elle n' estoit encore grandement asseuree. Mais au lieu de rendre ce bon & fidele service à son Maistre, il negotia le contraire, & fit promettre aux premiers Seigneurs de se reduire soubs la principauté de Clotaire. L' enfance des Princes, leur illegitimité, l' ancienneté de la Royne, sans aucun soustien, luy facilitoient en cela la voye de son dessein. Et sur l' asseurance qu' il prend d' eux; joint la secrette intelligence qu' il avoit avecques les autres Princes d' Austrasie, il ne douta de capituler avecques Clotaire: Mais soubs tel si & condition, qu' il seroit confirmé en son Estat de Maire du Palais, & qu' il n' en pourroit estre desposé, tant & si longuement qu' il vivroit. Chose qui luy fut aisément promise soubs grands sermens par Clotaire: lequel par ce moyen se faisoit Maistre des deux Royaumes à fort bon compte & petit bruit. Soubs cette asseurance Clotaire arme, & entre dedans les païs de Bourgongne & Austrasie, les fourrageans. Brunehaud qui lors sejournoit en la ville de Wormes, le somme par Ambassades de ne point passer plus outre. Mais luy asseuré des promesses qui luy avoient esté faites, declare qu' il n' en feroit rien, & qu' il ne vouloit estre creu, ny la croire de leurs differens, ains s' en rapportoit à la Noblesse, tant de Bourgongne, que d' Austrasie pour les juger. Sur cette response elle faict lever des gens, pour faire teste à son ennemy, soubs la conduite de Garnier, auquel elle avoit apres Dieu mis toute sa fiance, & luy consigne mesmement ses quatre enfans, pour les proteger. Les armees s' approchent l' une de l' autre, en bonne resolution (ce sembloit il) de joüer des cousteaux: Mais quand se vint au joindre, Garnier & ses partisans saignerent du nez, & se rendirent à celuy, qui les receut fort aisément à mercy, comme siens. Et pour rendre cette trahison en tout accomplie, Garnier meit és mains de Clotaire, tous les enfans de Theodoric, horsmis Childebert, lequel monté sur un bon roussin se garentit de vistesse; & toutesfoit ne fut depuis veu. Selon la supputation des Chroniques, il ne devoit estre lors aagé que de dix ans pour le plus, & neantmoins en ce bas aage il eut le sens & la force de se sauver des embusches du traistre. Des trois autres presentez au Roy je vous ay discouru par le precedant Chapitre ce qu' ils devindrent. Ainsi s' impatroniza le Roy Clotaire des Royaumes de Bourgongne & Austrasie, se faisant Monarque des deux Frances, tant deça, que delà le Rhin. Restoit la Roine Brunehaud, qui s' estoit sauvee en la Franche-Comté, ou és environs. Espine aucunement en la teste du Roy Clotaire: car advenant que Childebert fust retrouvé & retourné, on craignoit qu' il ne remuast quelque nouveau mesnage avecques sa bisayeule. C' est pourquoy Garnier pour complément de son bon & agreable service, la fit chercher par Herpon Comte d' Estable de Bourgongne (c' estoit lors ce que nous avons depuis appellé premier Escuyer du Roy) ayant esté trouvée, elle fut par Garnier presentee au Roy qui en fit l' execution telle que je vous ay discouruë. Tout ce que je vous ay icy presentement discouru, je l' ay emprunté d' Aimoïn. Vray que j' ay oublié la farce qui y est: car il dit que soudain apres que Brunehaud eut chargé Garnier & Alboïn, un autre sien confidentaire, de conduire Sigebert le long du Rhin, pour le faire recognoistre Roy par les villes de la nouvelle conqueste, elle escrivit tout aussi tost des lettres à Alboïn, luy commandant de le faire mourir. Les dites lettres estans par luy leües, & aussi tost deschirees en la presence de plusieurs Seigneurs, les pieces en furent sur le champ curieusement ramassees par un valet de Garnier, qui se donna le loisir de les adjuster ensemble sur une table avecques de la cire, & ayant trouvé qu' elles concluoient à la mort de son Maistre, il les luy bailla. Ce qui l' occasionna de tourner sa robbe, & de joüer tout autre rolle qu' il n' avoit promis de faire.

De ma part je ne doute point que Garnier qui estoit homme meschant, pour pallier sa trahison, ne meit du depuis ce faux pretexte en avant: mais il y en a si peu d' apparence que c' est manque de sens commun d' y adjouster foy. Ceux qui veulent donner quelque passe-port à ces lettres, disent que depuis le departement de Garnier la Royne estoit entree en deffiance de luy, sur un nouvel advis que l' on luy avoit donné. Quand ainsi eust esté, que non, Alboïn personnage de choix, & creature de la Royne, avoit peu lire ces lettres en presence d' autres Seigneurs, ne sçachant qu' elles contenoient: Mais apres les avoir leuës, voyant ce qu' elles contenoient, & qu' il les eust deschirees & mises en pieces devant eux, il est mal-aisé de le croire: Ny plus ny moins que du varlet qui se trouva à point nommé pour recueillir les pieces, & en apres se donna la patience de les rabienner sur une table, luy qui ne sçavoit qu' elles concernassent le faict de son maistre. Et vrayment il y a tant d' artifice exquis & affecté en ce discours, que l' homme le moins clair-voyant le jugera, non histoire, ains conte fait à plaisir, tel que l' on trouve dedans les histoires fabuleuses d' Herodote. Comme aussi est-ce la verité que si la Royne pendant le voyage du Roy Sigebert, fust entree en quelque nouveau soupçon de Garnier, le voyant à son retour plein de vie, elle se fust bien donnee garde (en ce grand coup d' Estat contre Clotaire) de luy laisser le commandement absolu sur son armee, & moins encores de mettre entre ses mains, non seulement son aisné, ains ses autres enfans puisnez pour les proteger. Et à vray dire cette seule consideration monstre qu' il y a eu beaucoup du Moine en Aimoïn, quand il a voulu faire passer à la monstre cette farce pour histoire.

Et tout ainsi que pour donner fueille à sa trahison, Garnier trouva ce faux pretexte; aussi pour la rendre de tout point excusable, il falloit figurer à Clotaire une Brunehaud pour la plus meschante & malheureuse Princesse, qui oncques eust esté veuë sur la terre. Or que Garnier avecques ses adherens fut celuy qui la fit depuis chercher, & estant trouvee en fit present au Roy Clotaire, pour la faire mal-mener de la façon qu' elle fut, vous le trouverez dedans le mesme Aimoïn faisant son propre fait de la mort de cette Princesse. Quelques uns, comme j' ay dit, estiment que cette mort soit une fable, pour l' enormité du supplice, singulierement de la part d' un Prince, qui en matiere de clemence fut le parangon de tous les autres, & mesme sur calomnieuses accusations. Toutesfois la grande obligation que Clotaire avoit à Garnier, qui l' avoit fraischement fait Roy de Bourgogne & d' Austrasie, sans coup ferir: Garnier vous dis-je, qui avoit interest de faire estimer par toute la populace, cette Princesse la plus detestable du monde, pour monstrer avecques quelle juste raison, il avoit affranchy son peuple de sa servitude, vous trouverez qu' il y avoit subject de la part du Roy, pour le grand contentement de son bien-faicteur d' une punition beaucoup plus griefve. L' atrocité de la peine faisoit croire que les delits dont ses ennemis la chargeoient, estoient veritables: Et à tant loüoient la nouvelle revolte de Garnier. En somme, pour finir ce Chapitre és deux Roys Clotaire & Charlemagne, par lesquels je l' ay commencé, il y eut sous leurs regnes deux grands traistres, Garnier sous Clotaire, Ganes sous Charlemagne. Contre cestuy-cy tous les Romains qui en ont escrit degenerent; d' autant que par sa trahison le Roy Charlemagne courut une mal-heureuse fortune en la journee de Roncevaux. Au contraire Garnier estoit infiniment honoré par la plume des Moines: Parce que sa trahison avoit tres-heureusement reüssi à l' advantage du Roy Clotaire. Et neantmoins Dieu ne voulut pas laisser, ny cette trahison, ny cette cruauté impunies, non point en la personne de Garnier, qui mourut de sa mort naturelle Maire du Palais de Bourgongne, ains de Godin son fils. Histoire que je veux vous discourir en passant avant que clorre ce Chapitre.

Ce jeune Seigneur soudain apres la mort de Garnier son pere, s' amouracha de Berthe sa belle mere, & l' espousa, dont le Roy Clotaire desmesurément indigné commanda qu' on le mist à mort. Toutes-fois il obtint sa grace par les intercessions & prieres de Dagobert fils aisné du Roy Clotaire, à la charge qu' il quitteroit sa nouvelle espouse: ce qu' il fit. Mais elle d' un cœur malin tout aussi tost l' accusa, qu' il avoit conjuré d' attenter contre la vie du Roy. Et ores que par plusieurs sermens par luy faicts solemnellement sur les Sainctes Evangiles és Eglises de sainct Medard de Soissons, sainct Vincent de Paris, sainct Martin de Tours, & sainct Aignan d' Orleans, il se fust purgé, combien que ce serment fust l' une des voyes que l' on practiquoit en ce temps là, pour la justification de celuy qui se pretendoit innocent, toutes-fois le Roy sans plus amplement s' en esclaircir, permeit qu' il fust assassiné par gens atitrez, au milieu d' un festin dedans la ville. Si justement, ou injustement, je m' en rapporte à ce qui en est. Tant y a que Dieu punit souvent les enfans pour les fautes commises par leurs peres: Ainsi prit en Godin fin la race & racine masculine de Garnier, & en tout ce que je vous ay par plusieurs Chapitres discouru, je voy la Justice de Dieu executee par l' injustice des hommes, pour se vanger des fautes par eux commises: Un Theodebert qui avoit violé le droict des armes au desadvantage de Theodoric son frere, estre avecques un sien fils par luy cruellement mis à mort. Et pour punir cette cruauté Theodoric mourir d' un coup de tonnerre, & en moins d' un an ensuivant ses enfans & son ayeule estre exposez à la mort par la trahison de Garnier, & commandement de Clotaire, Garnier puny apres sa mort en la personne de son fils, pour ne faire la parole de l' Eglise menteuse, quand elle dit: Ne reminiscaris peccata nostra, vel parentum nostrorum. Restoit à executer les vengeances, tant contre les anciennes cruautez de Fredegonde mere, que nouvelles du Roy Clotaire son fils: Dieu en fit une punition à la Royale. Car sans le chastier en sa personne, il voulut que dedans sa grandeur fust logé le commencement de la ruine de luy & de sa posterité, ainsi que j' ay plus amplement touché par l' un des precedens Chapitres.

vendredi 19 mai 2023

Les Recherches de la France

Recherches, France, Étienne Pasquier, 1611, 1621, Kindle

LES

RECHERCHES

DE LA FRANCE

D' ESTIENNE PASQUIER (Étienne)

(Editeur: Ramón Guimerá Lorente. V: u, exemple, Pasqvier: Pasquier; suiuant: suivant. I: j: Iean: Jean, Iurisdiction: Jurisdiction)

Augmentees par l' Autheur en ceste derniere Edition, de plusieurs beaux placards & passages, & de dix Chapitres entiers: dont le contenu se void au fueillet suivant.

A PARIS

Chez LAURENT SONNIUS rue S. Jacques, 

au Coq & Compas d' Or.

M. DC. XI. (1611) (Meslange avec 1621) (1643)

Avec Privilege du Roy.


LE LIBRAIRE

AUX LECTEURS.

MESSIEURS, 

Ayant recouvré de l' Autheur de ces presentes Recherches, plusieurs belles & riches augmentations, tant de placards & passages divers, que de Chapitres entiers, j' ay creu que je serois tort & à la reputation d' un si grand personnage, & si bien merité de la France, & à toute la France en general, si je n' en enrichissois cette derniere edition, & n' en gravois quelque recognoissance au frontispice d' icelle. Ce sont Recherches, qui ne seront pas, je m' asseure, estimees indignes d' accompagner les autres, qu' il vous a ja fait voir par cet œuvre. Car outre les rares pieces qu' il y a glacées en divers Chapitres, selon les occurrences, comme en ceux des Jesuites, de l' Admiral Chabot, de Jeanne la Pucelle, des degrez de parentele, & autres: encore puis-je vous affermer qu' il y a rangé dix Chapitres entiers, dont la valeur, à mon advis, n' est moindre que de tous les autres, si peutêtre elle ne les passe de beaucoup. A ceste occasion donc vous en ay-je voulu representer le contenu par la page suyvante. Quoy que c' en soit, si vous les lisez, je ne doute point que vous ne les opposiez à tout le reste, & que vous ne luy en s ensçachiez particulierement quelque gré. 

ADIEU.


CHAPITRES ADJOUSTEZ

EN CETTE DERNIERE EDITION

des Recherches de la France, 

par l' Autheur.

(N. E. Los números de página no coinciden con el pdf original)

I. De la Communauté des biens meubles, & conquests immeubles, qui esten nostre France, entre les mary & la femme.

II. Qu' il est quelquesfois dangereux de mesler les affaires d' Estat, & du Palais ensemble: exemple icy representé par le grand procés qui fut au Parlement de Paris entre Madame la Regente Louyse de Savoye, mere du Roy François I. & Charles Prince du sang, aisné de la maison de Bourbon, Connestable de France. 577

III. Histoire Tragique de Charles, aisné de la maison de Bourbon, Connestable de France. 585

IIII (IV). Deux exemples memorables de Clemence, l' un du Roy François I. en la punition du fait du Connestable de Bourbon: l' autre de nostre grand Roy Henry IIII (IV). en celle du Mareschal de Biron. 599

V. De la famille d' Anjou, qui dés & depuis le temps de Charles frere de S. Luoys (Louis) commanda au Royaume de Naples, & des traverses qu' elle y receut. 639

VI. Des pretensions de la seconde famille d' Anjou sur le Royaume de Naples, & des ruineux voyages qu' elle y fist. 653

VII. Fin de la seconde famille d' Anjou, avec un sommaire discours tant sur le Comté de Provence escheu à nos Roys, que des voyages de Naples par eux entrepris. 662

VIII. d' une grossesse prodigieuse advenue de nostre temps la ville de Sens. 700

IX. De quelques jeux Poetics qu' empruntasmes du Latin, qu' avons payés en monnoye de plus fort alloy, qu' ils ne nous furent prestez. 792

X. Fievre de sainct Vallier, & deux autres exemples de mesme subject. 880

TABLE DES CHAPITRES CONTENUS ES SEPT LIVRES DES RECHERCHES DE LA FRANCE. (9 Livres)

Du premier Livre.

Du tort que les anciens Gaulois, Et (&) ceux qui leur succederent se feirent, pour être peu soucieux de recommander par escrits leur vertu à la posterité, chapitre I. pag. 3.

Que Jules Caesar n' eut les Gaulois en opinion de Barbares, & que l' occasion de ce, vint de leur ancienne police, ensemble de ce que quelques Autheurs Italiens nous veulent blazonner de ce titre, chap. II. pag. 7. 

Combien le nom Gaulois s' amplisia anciennement: & contre les calomnies de quelques autheurs, qui sous leur faux donné à entendre, voulurent obscurir nos victoires, chap. III. pag. 14. 

De ce que l' ancien Romain appelloit les Gaulois legerschap. IV. Pag. 18.

Quels furent les defaux des Gaulois, au moyen desquels les Romains s' emparerent principalement des Gaules, chap. V. pag. 20.

Des François extraicts de la Germanie, & de leur ancienne demeurechap. VI. pag. 22.

Des courses que firent les François és Gaules, & comment & en quel temps ils s' en impatroniserentchapitre VII. pag. 26.

De l' entree, progrés, & fin de la Monarchie des Gotschap. VIII. pag. 35. 

Du progrés des Bourguignons en la Gaule, & pourquoy ils furent ainsi appellez, chap. IX. pag. 38.

Que les Romains presagissoient la ruine de leur Empire devoir venir de la Germanie, & de quelque fatalité qu' il y a eu en ce pays-là pour le declin de l' Empire, chap. X. pag. 39.

Des Bretons Gaulois, que quelques-uns estirement avoir emprunté leur nom de ceux de la grande Bretagnechap. XI. pag. 41. 

Des Normans, nouveau peuple de la Germanie, qui occuperent quelque partie de nostre Gaule, chapitre XII. Pag. 44.

Du pays de Gascongne, & du Languedocchapitre XIII. Pag. 48.

De ce que nos Autheurs rapportent l' origine des François aux Troyenschap. XIV. pag. 50.

Des Rois & Ducs que l' on tient avoir regné sur les François auparavant l' avenement de Pharamond à la Couronne, chap. XV. pag. 52.

Du second livre.

Lequel des deux, de la Fortune, ou du Conseil, a plus ouvré à la manution de ce Royaume de France, chap. I. pag. 54.

Du Parlement Ambulatoire, & premiere introduction d' iceluy, chap. II. pag. 57.

Du Parlement estably dans Paris, & des autres de ce Royaume, chap. III. pag. 62. 

De plusieurs particularitez qui concernent le Parlament ch. IV. pag. 77.

De l' ancienneté, & progrés de la Chambre des Comptes, ch. V. pag. 89.

De l' establiment du grand Conseil, & promotion d' iceluy. chap. VI. pag. 103.

De l' assemblee des trois Estats de la FranceCour des Aydes, sur le fait de la Justice, Tailles, Aydes, & Subsides, ch. VII. pag. 108.

Des Tresoriers Generaux de France, chapitre VIII. Page 118.

De l' Ordre des douze Pairs de France, & s' ils furent instituez par Charlemagne, comme la commune de nos Annalistes estime, chap. IX. pag. 121. 

Comment, & vers quel temps l' Ordre des douze Pairs de France fut institué, pour lesquels on appelle le Parlement, Cour des Pairs, & dont vient qu' on requiert leur presence aux sacres & couronnemens de nos Rois. Chapitre X. pag. 127.

Des Maires du PalaisConnestablesChanceliers, & autres Estats de telle marque, estans joignant la personne de nostre Prince, chap. XI. pag. 135. 

Des Ducs, & origine d' iceux, chap. XII. pag. 141.

Des ComtesBaillisPrevostsVicomtes, & Viguiers, chap. XIII. pag. 147.

De l' ancienneté des terres tenues tant en Fief, qu' en AlleudEscuyersGentils-hommes: Du Ban & Arriereban, chap. XIIII. pag. 152. 

Des NoblesGens-d'armesRoturiersVilainsChevaliersArmoiries de France: & plusieurs autres choses de mesme sujet concernans la Noblesse de France chapitre XV. pag. 162.

Du droict d' AineesseApanagesLoy SaliqueSucceßions (: successions) aux anciennes Duchez, & Comtez de la France, chap. XVI. pag. 173. 

Gouvernemens des Rois mineurs par les Roynes leur meres, Regences & majoritez de noz Rois, chap. XVII. pag. 181. 

Du troisiesme Livre.

De la preseance du sainct Siege de Rome, sur l' Eglise Catholique, chap. I. pag. 187.

Comment, & vers quel temps le titre d' Evesque universel se planta dedans l' Eglise, & en quelle façon les choses se passerent pour cest esgard, chap. II. pag. 196. 

D' où vient que par succession de temps nous avons appellé l' Evesque de Rome Pape, & que parlans à luy nous usons de ces mots, vostre Saincteté, chap. III. pag. 200.

Comme, & avec quel progrés les Papes s' impatroniserent de Rome, & d' une partie d' Italie, chapitre IV. page 202.

De la dignité de Cardinal introduite en l' Eglise Romaine, chap. V. pag. 214.

Des libertez de l' Eglise Gallicane devant, & sous la premiere lignée de noz Rois, chap. VI, pag. 219.

Du Pallium que le Pape Gregoire premier envoya à quelques Prelats de la France, & que l' ambition d' un costé, & l' affliction des Prelats d' un autre, cuiderent intervertir sous la premiere lignée de nos Rois, la liberté de nostre Eglise Gallicane, chap. VII. pag. 227.

Des libertez de l' Eglise Gallicane sous la seconde famille de nos Rois, chap. VIII. pag. 233.

Du dechet & debauche de nos privileges, sous la seconde lignée de nos Rois, chap. IX, pag. 239.

De l' authorité que les Papes se donnerent depuis la venue de Huge Capet, sur les Empereurs & Rois, interdiction des Royaumes, & autres discours de mesme subject, chap. X. pag. 249.

Des remedes dont les Princes estrangers userent contre les censures Apostoliques, & interdiction de leurs Royaumes, ensemble de ceux que nous y avons apporté sous la troisiesme lignée de nos Rois, chap. XI. pag. 256.

Que nos Rois sont francs, & exempts des censures de la Cour de Rome, chap. XII. pag. 262.

Que depuis la venue de Huge Capet, jusques au Regne de Sainct Louys, les Papes s' authoriserent plus en grandeur sur les Evesques & Ordinaires, qu' ils n' avoyent fait auparavant, & dont en proceda la cause, chap. XIII. pag. 267. 

Des EveschezAbbayes, & autres charges Ecclesiastiques, que nous appellons Benefices, & de la nouvelle forme de Republique, qui se planta dans nostre Eglise, depuis que ce mot de Benefice fut mis en usage, chapitre XIV. pag. 271.

Des entreprises de la Cour de Rome sur les libertez de nostre Eglise Gallicane, depuis la venue de Hugues Capet, jusques au regne de sainct Louys, & comment le Clergé de France ne s' en pouvoit taire, chapitre XV. pag. 274.

De l' ordre que Sainct Louys apporta pour la manutention des Libertez de nostre Eglise Gallicane, chap. XVI. pag. 280.

Des GracesExpectativesMandatsIndults ApostolicsExactions faites en Avignon, & du remede que nostre Eglise Gallicane y aporta, chap. XVII. pag. 283. 

De quelle vertu l' Eglise Gallicane proceda pour exterminer le grand schisme qui advint pendant le siege d' Avignon, & des vertueuses procedures faites contre Pierre de la Lune, dit Benoist tresiesmechap. XVIII. pag. 287.

Continuation des Calamitez que produisit le siege tenu dans Avignon, & du grand Schisme qui en provint, chap. XIX. pag. 292.

De l' heresie de Jean Hus qui se planta dans le Schisme, & avecq' quelle dignité le Concil de Constance proceda à l' extirpation tant du Schisme, que de l' heresie, par l' entremise de nostre Eglise Gallicane, chap. XX. pag. 295. 

Du Concil tenu en la ville de Basle (BaselBasilea), quelques ans apres le Concil de Constance, dont fut extraite une bonne partie de la Pragmatique Sanction faite à Bourges du temps du Roy Charles VII. chap. XXI. Pag. 304.

De la nomination que les Graduez des Universitez ont sur les Ordinaires, & dont procede ceste ancienneté, chapit. XXII. Pag. 307.

De l' Université de Paris, chap. XXIII. Pag. 309.

De la puissance que nos Rois ont sur la discipline & meurs de leur Clergé, & comme s' ils veulent regner heureusement, il est requis qu' ils n' en mes-usent, chap. XXIV. Pag. 321.

Des coustumes que le Clergé appelle louables, pour quelquefois couvrir la pudeur de son avarice, chap. XXV. Pag. 324.

Des entreprises anciennes que faisoient les Ecclesiastiques sur la Jurisdiction seculiere, chap. XXVI. Pag. 326.

Des appellations comme d' abus, remede introduit tant contre les entreprises des Ecclesiastics, que reformation de leurs mœurs, chap. XXVII. Pag. 328.

Du Concil de Trente, & que l' Appel comme d' abus est un moyen par lequel on se peut pourveoir contre toutes les entreprises qui se sont au prejudice des libertez de nostre Eglise Gallicane, chap. XXVIII. Pag. 335.

De l' ancienneté des Regales en matiere des Archeveschez & Eveschez, chap. XXIX. Pag. 339.

De l' ordre des Regales sous la troisiesme lignée de nos Rois, serment de fidelité, que les Archevesques & Evesques leur doivent avant que d' entrer en leurs charges, & des investitures que les Empereurs d' Allemaigne faisoyent des Archeveschez, & Eveschez, chap. XXX. 345.

Des Benefices que nous avons dit vacquer en Regale sous la troisiesme lignee de noz Rois, chap. XXXI. Pag. 349.

De l' institution des Chanoines & Prebendes, & dont vient que pendant l' ouverture de la Regale, nos Rois les peuvent conferer. chap. XXXII. 358.

Du profit & emolument des Regales, qui appartient aujourd'huy aux Thresorier & Chanoines de la Saincte Chappelle de Paris, chap. XXXIII. Pag. 362.

Des Oblats appellez Religieux Lais, chap. XXXIV. Pag. 364.

Des Dixmes Infeodees, chap. XXXV. Pag. 368.

De la secte des Jesuites, chap. XXXVI. Pag. 372.

Plaidoyé pour l' Université de Paris encontre les Jesuites, ch. XXVII. Pag. 377.

Quelle compatibilité il y a entre la profession des Jesuites, & les regles, tant de nostre Eglise Gallicane que de nostre Estat. chap. XXXVIII. Pag. 409

Du quatriesme Livre.


Du gage de Bataille dont userent anciennement les François, pour la verification de leurs faicts, & par especial és matieres Criminelles.

De l' atouchement du fer chaud, autre maniere de preuve que l'on observoit quelquefois és causes Criminelles.

De l' authorité du Serment, & d' une maniere de preuve qui se faisoit quelquefois par iceluy.

De quelques sorts que pratiquoyent nos anciens François pour s' informer des choses qui leur estoyent à venir.

De l' Estat & condition des personnes de nostre France, avecques un sommaire discours des servitudes tres-foncieres qui se trouvent en quelques unes de nos Provinces, & de leurs manumissions.

Bourgeoisies du Roy, droits de Juree en Champagne, & que nous avons en France quelques images des anciennes libertez de Rome.

Des droits de Juree, & Bourgeoisie du Roy

Des Ordonnances de Charlemaigne pour obvier aux fraudes que l' on pratiquoit en France sous le pretexte des Clericatures

Des Bonnets qu' on prend aux licences, & maistrises des Escoliers, Estreines, Banquets, que l' on fait à la feste des Rois

Pourquoy en matiere de
cession de biens, l' on fait abandonnement de sa ceinture devant la face du Juge.

Sçavoir si la proposition, que l' on tient aujourd'huy au Palais, que le Roy ne plaide jamais dessaisy, a esté tousjours observée en cest France. 

D' une coustume ancienne que l' on observoit en France, en matiere de prisonniers de guerre

Qu' il y eut certain siecle en la France, pendant lequel la signature estoit incognuë.

D' où vient que l' on a estimé les Greffes, & Tabellionnez être du Domaine du Roy, ensemble sommaire discours sur les Notaires, & Clercs des Greffes. 

Jeux de Paulmes, Bonnets ronds.

D' une coustume ancienne qui estoit en France, de crier Noüel pour signification de joye publique.

De la distribution des Offices, & Confirmations d' iceux à l' advenement de Rois, Prevostez en garde, ou en ferme, & autres choses de mesme sujet.

Du Couvre-feu, autrement appellé Carfou, introduit en plusieurs villes de la France.

Vers quel temps un tas de gens vagabons, que les aucuns nomment Aegyptiens, les autres Bohemiens, commencerent de roder en ceste France.

Dont vient qu' anciennement en la France representation n' avoit lieu tant en ligne directe, que collaterale.

De la Communauté des biens meubles, & immeubles, qui est en nostre France entre le mary & la femme.

Sommaire deduction des nombres François. Et pourquoy par V. nous signifions cinq. & par X. dix, & par L. cinquante, & par D. cinq cens.

Des Epithetes que nos ancestres donnerent à quelques uns de nos Rois par honneur, aux autres par attache. Depuis quel temps apres leurs decés leurs Epithetes se sont tournees en ceremonie, ensemble sommaire discours sur les surnoms.

Invention de l' Imprimerie, & Artillerie.

Contre l' opinion de ceux qui estiment que l' invention du Quadrant des Mariniers, est moderne.

De la fatalité qui se trouve quelques fois és noms.

D' une maniere assez familiere aux anciens François, & mesmement aux Advocats au commencement de leurs Plaidoyez d' importance, & des harangues qui se font par les gens du Roy, en la ville de Paris, à l' ouverture des Parlemens.

De quelques maladies dont les aucunes furent autrefois incogneuës, & les autres ont eu seulement une fois cours par la disposition de l' air.

De quelques secrets de nature, dont il est malaisé de rendre la raison.

Que les Sergents faisans leurs exploicts portoient anciennement des manteaux Bigarrez.

Du jeu des Eschecs.

De l' an, & jour que l' on desire és matieres de Retraicts lignagers, & de Complainte

Du droict de Chambellage porté par quelques Coustumes, & dont il procede.

Du cinquiesme Livre.

Des admirables exploits de guerre du grand Roy Clovis, forlignement de sa posterité, & comment la Couronne de France fut transportee de sa famille, en celle de Charles Martel.

Que la mort de Bernard Roy d' Italie, petit fils de l' Empereur Charlemagne fut une mort d' Estat, contre l' opinion commune de nos Historiographes.

Guerres civiles, entre l' Empereur Louys le Debonnaire & ses enfans.

(Cheute de la famille de l' Empereur Charlemagne, & de sa posterité.)

Que le Roy Charles le Chauve fut l' un des principaux instrumens de la ruine des Martels, & changement de leur Estat en ceste France.


Livre sixiesme.


De la fatalité qu' il y eut en la lignee de Hugue Capet, au prejudice de celle de Charlemagne, & contre la sotte opinion de Dante Poete Italien, qui estima que Capet estoit yssu d' un Boucher.

Qu' il n' y a riens tant à craindre en une Republique, que la minorité d' un Roy.

Des furieux Troubles qui advindrent en France, sous le regne de Charles VI

Du restablissement de l' Estat sous Charles VII. Et comme en cecy il y eut du miracle tres-expres de Dieu

Sommaire du Procés de Jeanne la Pucelle.

De deux traicts de liberalitez remarquables. 

De quelques tromperies de Princes par mots à double entente.

Du Royal Apophthegme du Roy François premier de ce nom, & aussi d' une rencontre que luy fit on Moine de Marcoucy.

Du procés extraordinaire fait premierement à Messire Philippe Chabot Admiral de France, puis à Messire Guillaume Poyet Chancelier.

Qu' il est tres-dangereux au suject, quel qu' il soit, de se faire craindre par son Roy, exemple memorable en la personne du Connestable de sainct Paul

Qu' il est quelquefois dangereux de mesler les affaires d' Estat & du Palais ensemble: exemple icy representé, par le grand procés qui fut au Parlement de Paris, entre Madame la Regente Louyse de Savoye, mere du Roy François premier, & Charles Prince du sang, aisné de la maison de Bourbon, Connestable de France.

Histoire tragique de Charles, aisné de la maison de Bourbon, Connestable de France

Procedures tenuës en la foy & hommage, que feit Philippes Archiduc d' Austriche, à nostre Roy Louys douziesme.

Deux exemples memorables de Clemence, l' un du Roy François premier en la punition du fait du Connestable de Bourbon, l' autre de nostre grand Roy Henry quatriesme en celle du Mareschal de Biron.

De la mort de Marie Sthuart Royne d' Escosse, veufve en premieres nopces de François II. de ce nom Roy de France.

Des mots dorez & belles sentences de Maistre Alain Chartier

Sommaire discours sur la vie de Pierre Abelard, & des Amours d' Heloïse.

Traict memorable de Chevalerie, courtoisie, & liberalité du Chevalier Bayard.

De l' honneste amour du Capitaine Bayard envers une Dame, de la sage retraicte de luy en l' execution d' un amour vitieux.

Traits de liberalité du Capitaine Bayard.

De quelle ruze le grand Capitaine Bayard sauva la ville de Maisiere contre les forces de l' Empereur Charles cinquiesme.

Quelles courtoisies receut le Capitaine Bayard non seulement des François, mais aussi de ses ennemys, avecques un sommaire discours de sa mort.

De la juste vengeance de Dieu pour une impieté commise de fils à pere, & au contraire repremiation pour pieté.

Combien les maledictions des peres, & meres contre les enfans, sont à craindre.

Du Royaume de Hierusalem, & pourquoy les Rois de Naples & Sicile se pretendent Rois de Hierusalem.

Quel fruict nous rapportames des voyages d' outremer, que nos Ancestres appelloient Croisades.

De la famille d' Anjou qui dés & depuis le temps de Charles frere de saint Louys commanda au Royaume de Naples, & des traverses qu' elle y receut.

Des pretensions de la seconde famille d' Anjou sur le Royaume de Naples, & des ruineux voyages qu' elle y fist.

Fin de la seconde famille d' Anjou, avec un Sommaire discours, tant sur le Comté de Provence escheu à nos Roys, que des voyages de Naples par eux entrepris.

Qu' il n' est pas expedient pour un Prince, de mettre ses commandemens faicts par colere en prompte execution.

Que les Royaumes ont esté quelquefois conservez pour avoir esté les jeunes Princes mis sous la protection & tutelle de leurs ennemis.

Du traictement que receut Jean de Bourgongne, Comte de Nevers par Basayath (Basaith) Roy des Turcs, & de celuy que receut depuis le mesme Basaith par Tamberlan

D' un amour prodigieux de Charlemagne envers une femme.

Du gouvernement des Provinces qui tombe és femmes, & de la magnanimité ancienne de quelques Princesses.

De l' honneste & vertueuse liberté dont usa quelquefois tant la Cour de Parlement de Paris, que Chambre des Comptes, pour la conservation de la Justice.

De quelques traits miraculeux, tant pour garentir l' innocence de la calomnie, que pour averer en Justice un delict, qui ne se pouvoit presque descouvrir. Exemple dernier advenu de nostre temps en la personne d' un nommé Martin Guerre.

Preuve miraculeuse advenuë tant au Parlement de Rouen, que de Paris, pour deux crimes dont la preuve estoit incogneuë aux Juges.

Qu' il est quelquefois expedient pour le bien de la chose publique passer pardessus les formalitez de Justice.

Que ce n' est pas un petit secret à un homme d' Estat, d' avoir des Predicateurs à poste.

Histoire memorable d' un jeune homme de prodigieux esprit.

D' une grossesse prodigieuse advenue de nostre temps en la ville de Sens.

De Seigneurs de Seissomme & d' Origny freres jumeaux conformes de face, & façons en toutes choses.

Du malhereux succés d' Anguerrand de Marigny, & de quelques autres exemples de mesme Tragedie.

Des Songes

De quelques memorables Bastards, qui ont esté en ceste France, & autres discours de mesme sujet.

De la charité de six notables Bourgeois de la ville de Calais envers leurs Citoyens.

Excellente response d' une femme à un frere Prescheur, pour induire les hommes à bien faire, seulement pour l' honneur de Dieu.

De deux accidens casuellement advenus au Parlement de Paris, portans presages des malheurs qui depuis advindrent en la France. 


Du septiesme Livre.


De l' Origine de nostre Poësie Françoise, chap. I. pag. 712.

Des vers Latins Rimez que nos ancestres appelloient Leonins, & pourquoy ils furent ainsi appellez, ch. II. Pag. 715.

De l' ancienneté & progrés de nostre Poësie Françoise, chap. III. Pag. 718.

De la Poësie Provençale, chap. IV. Pag. 727.

Des Chants Royaux, Ballades & Rondeaux, chap. V. pag. 731.

(Chapitre VI?)

De la grande flotte de Poetes que produisit le regne du Roy Henry deuxiesme, & de la nouvelle forme de Poesie par eux introduite, chap. VII. pag. 738.

Quelques observations sur la Poesie Françoise, chapit. VIII. Pag. 748.

Si la Poesie Italienne a quelque advantage sur la Françoise, chap. IX. Pag. 755.

Que nostre langue Françoise n' est moins capable que la Latine de beaux traicts Poetics, chap. X. pag. 760.

Que nos Poetes François imitans les Latins les ont souvent esgalez, & quelquefois surmontez, chap. XI. Pag. 763.

Que nostre langue est capable des vers mesurez tels que les Grecs & Romains, chap. XII. Pag. 778.

De quelques jeux Poetics, Latins & François, ch. XIII. p. 784.

De quelques autres jeux Poetics, qu' empruntames du Latin, qu' avons payez en monnoye de plus fort alloy qu' ils ne nous furent prestez, chap. XIV. Pag. 792.
(
Des vers Latins retournez, & comme les François de nostre temps ont emporté en cecy le devant des anciens.)

Vers François tant rapportez que retournez.


Du huictiesme Livre.

De l' origine de nostre vulgaire François, que les anciens appelloient Roman, & dont procede la difference de l' Orthographe, & du parler, chap. I. pag. 799.

De combien d' Idiomes nostre langue Françoise est composee, & si la Gregeoise y a telle part comme l' on pretend, ensemble de quelques anciens mots Gaulois, & François, et autres qui sont purs Latins en nostre langue, chap. II. gap (pag) 805.

De la diversité de l' ancienne langue Françoise avecques celle du jourd'huy, chap. III. Pag. 810.

Dont vient qu' en nostre langue Françoise parlans à gens de plus grande qualité que nous, on use du mot de vous, pour tu, & au menu peuple du mot de tu, pour vous, chap. IV. Pag. 816.

De ces mots de Dom, Dam, Vidame, Dame, Damoiselle, Damoiseau, Sire, Seigneur, Sieur, chap. V. pag. 819.

Des mots qui par leur prononciation representent le son de la chose signifiee, que les Grecs appellent Onomatopeies, & signamment des mots Ahan, & Ahanner, chap. VI. pag. 826.

De ce que nous appellons Sales à faire Festes, les Sales ordonnees pour faire dances & banquets, & de ces mots, Festins, & festoyer, chap. VII. pag. 828.

Apprendre, ou dire quelque chose par cœur, ch. VIII. Pag. 831.

Du Proverbe, Je veux qu' on me tonde, dont userent anciennement nos Peres & ayeuls, pour signifier une peine, chap. IX. Pag. 833.

Du Proverbe, Faire la barbe à quelqu'un, chapitre X. page 836.

Du Proverbe, Bonne renommee vaut mieux que ceinture doree, chap. XI. Pag. 837.

Laisser le Monstier où il est, chap. XII. Pag. 838.

Des mots de Clerc, & Secretaire, & du Proverbe, Parler Latin devant les Clercs, chap. XIII. Pag. 840.

Plus resolu que Bartole, ou bien resolu comme un Bartole. (Chapitre XIV)

Sur ce que le peuple compare la femme qui s' addresse au pire, à la Louve, & de quelques autres Proverbes empruntez de la nature du Loup

Entre Chien & Loup.

Faire des Chasteaux en Espagne.

Des Proverbes qui sont tirez en nostre langue de ce mot, Chapperon.

De ces mots, Maistre, Souverain, Suzerain, Sergent.

De ces mots, Assassin, Assassinat, Apanage, mots empruntez des Voyages d' Outre-mer.

Dont vient ce cry public, Saint Denis Mont-joye, que l' on dit avoir esté autrefois usurpé par nos Rois en champ de bataille.

De ce que par maniere de gausserie on appelle Puceaux ceux qui au soufle de leur haleine r'allument une chandelle esteinte.

De quelques Proverbes François tirez des Monnoyes.

De ces mots, Compagnon, Compagnie, Compain.

De quelques manieres de parler tirees de la nature des Fiefs

De ces mots de Fy entre les François, & de Physicien, usurpé pour Medecin par nos Ancestres.

De ce que nous appellons nos creanciers Anglois.

Nul n' est Prophete en son pays.

C' est la Coustume de Lorry, où le batu paye l' amende.

D' où vient le mot de Bessons, & quelques autres mots François, tirez de mesme etymologie.

Gehir, & Gesne.

De la derivaison de ce que l' on dit Guet apens.

Passer plusieurs choses par un Fidelium, & autres Adages de mesme subject.

De ces mots, Veilles des Festes, Vespres, Encens, Reliques, & Collations que l' on fait quand on jeusne.

Courir l' Esguillette

Du mot, Abandonner, & de son origine.

Ferté, Parage, Piédefief, & autres dictions racourcies en nostre langue.

Avoir laissé les houzeaux, pour denoter un homme qui est mort.

Fievre de S. Vallier, & deux autres exemples de mesme sujet.

Plus malhereux que le bois dont on fait le Gibet.

Qui a à pendre n' a pas à noyer.

Tru, Truage, Truant, Maletoulte, Pautonnier, Coquin, Cagnardier, Gueux de l' ostiere.

De ces mots, Voleurs, & Brigands.

Ribaux, Ribaudes, Roy des Ribaux.

Capet & Hutin.

Mestayer, Moytoien, Mien & Tien.

De ce que le peuple dit un homme estre bon, riche, ou vertueux par dessus l' espaule, lors qu' il se mocque.

Sans Feu & Leu.

Entendre le Numero.

Beau pere, & autres mots concernans tant la Parenté, qu' Affinité, ensemble de quelques autres mots, dont l' usage ne seroit peut estre hors propos.

Du mot de Bande, dont les François usent pour Assemblee.

De ce mot, Tintamarre.

De ceste diction, Riens.

Marquis, Marchal, Mareschal, Maire.

Du mot, Huguenot.

Vespres Siciliennes, Proverbe sur lequel est par occasion discouru de l' Estat ancien de la Sicile, & des traictemens que recevrent ceux qui la possederent.

De ces mots, Traistre (Trahistre), Trahir, Trahison.

Rompre la Paille, ou le Festu avec quelqu'un.

Patelin, Pateliner, Patelinage, & de quelques Adages & mots que nos ancestres tirerent de la Farce de Patelin.

Villon, Villoner, Villonnerie.

Pleger celuy qui boit à nous d' autant, Couquu, Avoir veu le Loup, Loup-garou, Abry, Toutes manieres de dire dont on use à contre-sens.

De quelques particuliers Proverbes, & mots dont le peuple use par corruption de langage.

De quelques lettres doubles qui sont dans nostre Alphabet, K. Q. X. ET. 9. 

Fin.

Livre neufiesme.

Que la Gaule depuis appellée la France, de toute ancienneté a esté studieuse des bonnes lettres.

Ville de Paris.

Opinion commune que Charlemagne a esté fondateur de l' Université de Paris.

Que l' opinion est erronée, par laquelle on attribuë l' institution de l' Université de Paris à l' Empereur Charlemagne.

Premiere institution & progrez de l' Université de Paris, & de son ancienne situation.

Suite de la fondation de l' Université de Paris.

Vers quel temps les estudes de Paris prindrent le nom & le titre d' Université.

Que ce n' est pas un petit honneur à la ville de Paris, d' avoir esté premierement nommee Université sous le regne de Philippes Auguste.

Que du commencement il n' y avoit que deux Facultez és escholes de Paris, qui print le nom d' Université.

Faculté de Theologie.

Faculté de Decret.

Faculté de Medecine.

En quels lieux de la ville se faisoient les leçons aux escoliers avant l' introduction des Colleges, où elles sont depuis abouties.

Conclusion de tous les discours precedens concernans l' Université de Paris. (Université de Naples)

Introduction des Colleges, & signamment de celuy de la Sorbonne.

College de Navarre.

Autre plant des escoles de l' Université de Paris.

Introduction des Professeurs du Roy, autre plant des escoles de l' Université de Paris.

De trois chaires publiques fondees en l' Université de Paris, sur le modele des Royalles, par trois de privee condition.

Premier abus qui s' est trouvé en la promotion des professeurs du Roy, qui en produit plusieurs autres au prejudice de l' Université.

Chancelier de l' Université.

Recteur de l' Université.

Jurisdiction contentieuse du Recteur.

Escoles de France, Picardie, Normandie, d' Angleterre: ceste-cy aujourd'huy nommee d' Allemagne, & depuis quel temps, & pourquoy.

Reformations de l' Université de Paris.

Que nos Roys ont eu sur tous autres, bonne part en la creation & directions des universitez de France, & que de toute ancienneté ils ont qualifié l' Université de Paris leur fille.

Privileges octroyez par nos Roys à l' Université de Paris.

Sçavoir si la science des Loix reduite en Digestes sous l' authorité de Justinian, a esté autresfois enseignee en l' Université de Paris.

Invention de l' Imprimerie, & comme & vers quel temps la langue Latine commença d' estre diversement cultivee en l' Europe.

College & Confrairie des Chirurgiens en la ville, Prevosté & Vicomté de Paris.

Du different ancien, qui a esté & est entre la faculté de Medecine de Paris, & le College des Chirurgiens.

Des differens d' entre les Chirurgiens & Barbiers.

Que le Droict Civil des Romains, compilé par l' ordonnance de l' Emp. Justinian, fut longuement perdu, & quelque centaine d' ans apres retrouvé.

Restablissement du Droict Civil des Romains, & premier aage de ceux qui le commenterent.

Second aage de ceux qui commenterent le Droict.

Des deffenses faites par le Pape Honoré III. d' enseigner le Droit des Romains en l' Université de Paris.

Universitez de Loix, & quand, & comment le Droict Civil des Romains se vint loger en nostre France.

Du nouvel ordre de Pratique judiciaire, que nos ancestres enterent sur le Droit Civil des Romains.

Troisiesme aage de ceux qui ont mis leurs plumes sur l' explication du Droict Romain.

Pays coustumier, & de Droict escrit en la France.

Par quelles personnes estoit anciennement la Justice renduë en France, & de quelques ineptes chicaneries, que nous avons depuis tirees du Droict des Romains.

Fiertre de S. Romain de Rouen, & de son ancien privilege.


LIVRE DIXIESME.


Admirables secrets de la toute-puissance de Dieu, qui se trouvent en la premiere famille de nos Roys.

Deportemens extraordinaires tant bons, que mauvais, de la Royne Fredegonde, selon la commune leçon de nos Historiographes.

Quel aage pouvoit avoir le jeune Clotaire, lors que Fredegonde sa mere en fit pavois contre ses ennemis.

Deportemens dereiglez de la Royne Brunehaud, suivant la commune leçon de nos Histoires.

Sommaire recueil des vices qu' on impute à Brunehaud.

Comparaison des deportemens de Fredegonde & Brunehaud Roines, selon l' ancienne leçon.

Folles amours de la Roine Fredegonde avec Landry Maire du Palais. Meurtre du Roy Chilperic par eux procuré. Histoires fabuleuses.

Diverses leçons en l' histoire de la Roine Brunehaud, avec un sommaire discours de ce qu' on trouve à son advantage, tant dedans Gregoire de Tours, que S. Gregoire Pape.

Qui sont les Autheurs qui ne condescendent à la farouche opinion des vices & cruautez qu' on impute à Brunehaud.

Premier traict de cruauté tres-damnable, faussement imputé à Brunehaud.

Seconde cruauté signalee, faussement improperee à Brunehaud.

Troisiesme cruauté, dont faussement on accuse Brunehaud.

Sur ce que l' on impute à Brunehaud, que pour se vanger, elle fit entendre à Theodoric, que Theodebert estoit fils d' un Jardinier; Qui fut le seminaire des divisions des deux freres.

Autres, tant cruautez qu' amourettes, imputees à Brunehaud sur sa vieillesse.

Vie du bon Pere Colombain, & banissement indigne contre luy procuré par la Royne Brunehaud.

Que du precedant Chapitre on peut recueillir qu' on attribue faussement plusieurs cruautez à Brunehaud, & autres mal-façons de sa vie.

Que sans calomnie on ne peut remarquer en Brunehaud, qu' elle fut cause de la ruine des Roys Theodebert & Theodoric ses petits enfans: ainsi que la commune de nos Historiographes soustient.

Quel jugement nous pouvons faire de la vie de Brunehaud, par le livre de l' Abbé Jonas, qui escrivit la vie de sainct Colombain, observation non à rejetter.

Procedures extraordinaires inexcusables, & faits calomnieux, sur lesquels la Royne Brunehaud fut exposee à un impiteux supplice.

Dont procederent les calomnieuses accusations contre la Royne Brunehaud, & qui fut la vraye cause de la cruauté exercee contre elle.

Qu' entre tous les Roys de France, Clotaire second semble avoit esté le plus heureux, & neantmoint qu' en luy commença la ruine de la premiere famille de nos Roys.

Qui furent Fredegaire & Aimoin les mesdisans.

Quelle creance on doit avoir en Aimoin parlant du temps de Fredegonde, & de Brunehaud.

Qu' Aimoin faisant mention de Brunehaud, en parle avec passion contre l' honneur d' elle.

Cheute de la seconde famille de nos Roys.


Pour-parler du Prince.

Pour-parler de la Loy.

Pour-parler d' Alexandre.


Extraict du Privilege du Roy.

FIN.

(Texte grec. + Image. Étienne Pasquier. Thomas * de Lev * F *. 

– Anno aetatis 87 – Steph. Paschasius Regiarum Rationum Patronus – Nulla hic (î: hinc) Paschasio manus est, lex Cincia quippe Caussidicos nullas sanxit habere manus. - L. Gaultier incidit. 1617.)

Étienne Pasquier. Thomas de Lev – Leu


Ne frustra in tabula manum requiras, 

En vultum aspicito, manum videbis.

N. Audebertus in supremo Armoricum senatu Consiliarius.